Rachel refusa de me rendre mes habits, prétextant qu’ils méritaient un bon coup de fer à repasser. Dans sa grande générosité, elle m’autorisa l’accès de la douche.
La chambre moche était plus que moche. A part un sommeil d’acier sur pied et un matelas à ressort, elle possédait quand même un placard avec quelques draps, une couverture miteuse, un oreiller et une curieuse valise laissée intentionnellement entrebâillée.
Une cravache jumelle de celle de Rachel s’échappait de l’embrasure. Je l’ouvris complètement et là, l’angoisse! Un fouillis de cordes, de chaînes, de menottes, de cadenas et de trucs bizarres dont un qui me mit à vibrer tout seul.
La porte blanche souvrit. Panique noire et alerte rouge.
– Ne mapprochez-pas, Barbe bleue, ou je hurle ! Je suis experte en judo, vous savez.
– Tu ne me tutoies plus, Adèle ? Ah ! Je comprends. Ecarte-toi de ma valise ! Tu vas user les piles.
Calme-toi ! Pour qui me prends-tu ? Je ne vais pas assassiner la petite fille fontaine que je viens dhéberger. Lexploiter un peu, je ne dis pas. Tout dépendra de son envie de renouveler lexpérience et uniquement de cela. Je vais te laisser reprendre tes esprits et réfléchir à tout ça. Je mets tes habits sur la chaise. Ils sont repassés. Tu me diras demain si tu acceptes ou non dhabiter sous mon toit.
Avant de partir, elle ajouta : « Regrettes-tu de têtre laissée faire? »
– Non, la question n’est pas là ! Qu’allez-vous penser de moi? Jai honte de ma réaction, cest tout. J’ai peur aussi de passer à vos yeux pour une fille facile parce que je n’ai pas été assez forte pour vous résister.
– Nous avons le même problème toutes les deux. Nous en discuterons demain et tu me diras si tu acceptes de monter dans ma Maserati décapotable.
– Elle est à vous la Maserati garée devant la maison. Waah!
– Oui, un caprice de vieille fille riche. J’y tiens comme à la prunelle de mes yeux. Si tu poses ton cul sur le siège, je prendrai mes précautions.
– Chouette! Désolée pour le canapé! Jurez-moi de ne parler à personne de ce qui sest passé!
– Personne n’en saura jamais rien, juré, si tu arrêtes de me vouvoyer du moins!
J’aurais pu en rester là et me taire, ou lui répondre: " J’espère qu’il fera beau demain pour retourner au Luxembourg" ou encore « J’ai hâte de t’accompagner dans ta voiture de sport" . Non! Complètement déstabilisée, je lui balançai à la figure: "Jai adoré quand tu me tapotais les seins avec ta cravache. Pourquoi tu ne mas pas tapé sur les cuisses ?"
– Parce que tes jambes sont trop parfaites pour risquer de les amocher mais surtout parce que tu es trop forte en judo. Fais de beaux rêves !
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Un sommeil de plomb m’emmena au pays merveilleux des rêves érotiques.
Il n’était pas encore sept heures quand Rachel m’appela pour petit déjeuner.
Ma propriétaire ne s’était pas contentée de repasser ma blouse et ma jupe, elle avait pris le temps d’en découdre les ourlets pour me les raccourcir drastiquement. Un massacre vestimentaire assurément mais, en contre partie, la sensation grisante d’offrir mon corps sans détour à la perverse Rachel !
Entre deux croissants, elle en profita pour me questionner sur la pseudo virginité que je proclamais avec autant d’aplomb. En fouillant dans mes souvenirs, je me suis rappelée le sermon que maman avait passé à son grand frère le jour de l’anniversaire de mes seize ans. Abusant de ma naïveté, il m’avait câlinée toute l’après avant, probablement, de me dépuceler avec son index.
– Si nous voulons éviter les files, il est grand temps de partir t’inscrire à l’université. Je connais intimement la grande majorité des secrétaires et inversement. Quand elles nous verront ensemble, moi endimanchée et toi aussi déshabillée, elles vont jacasser. Je les connais. Je te présenterai comme ma nièce. Cela clouera définitivement leur bec.
Trois quarts d’heure pour se garer et trois quarts d’heure de files avant de rentrer dans la salle d’inscription. Pire qu’à Euro Disney.
La Maserati rouge n’était pas discrète mais ce n’était rien à côté de ma tenue qui excita gravement les futurs bacheliers.
Le fait d’être serrés comme des sardines facilitait énormément les contacts et les initiatives.
Je me répète mais, dès que quelqu’un me touche, je monte en température.
Quand cet élève de master me toucha les fesses, je m’alanguis. Quand il fit remarquer à ses voisins que sa voisine ne portait pas de culotte, je me réveillai brutalement et, par un réflexe stupide, je remontai ma jupette pour lui prouver son erreur.
Je compris ma stupidité quand la file entière fit volte face pour m’accabler de sarcasmes et de sous-entendus.
Rachel avait pris les devants pour retrouver une amie préposée aux inscriptions et commencer à remplir les fastidieux formulaires à ma place pour gagner un peu de temps. Quand elle revint, elle ne trouva toute chamboulée.
Irritée ou jalouse, elle m’arracha le bras pour me soustraire aux attouchements dont j’étais la victime complaisante.
– Ton immaturité est affolante, ma nièce. J’avais pourtant insisté pour que tu t’habilles correctement mais tu n’en fais encore une fois qu’à ta tête. Reboutonne ton chemisier! Tu ne remarques même pas que tu as un sein qui sort.
– Mince alors!
Eclats de rire général et honte sur moi!
– En voiture, toutes les formalités sont réglées! Nous n’avons plus rien à faire ici.
Elle avait non seulement payé mon minerval e ses deniers mais m’offrait une impayable carte de sport à l’année.
– Il te suffira de cocher un maximum de trois disciplines sportives quand tu auras fait ton choix.
– Merci Tata Rachel!
– J’aime beaucoup quand tu m’appelles Tata. Garde cette bonne habitude!
Mine de rien, Rachel venait d’installer son emprise sur moi. Je me sentais redevable vis à vis de cette femme dont les intentions obscures faisaient éclore en moi des fantasmes abjects.