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Chroniques immortelles – Chapitre 18




Ça fait longtemps que je n’avais pas baisé comme çà, depuis la dernière bacchanale sur Éden pour être précise. Je suis brisée, et après un long bain relaxant, jai dormi comme une brute. J’apprendrai plus tard pour l’anecdote que Antinea a fait la fête toute la nuit et a fini d’épuiser tous les hommes les uns après les autres, la tricheuse !

Mais au matin je suis réveillée par des cris de joie et des youyous venant du harem. Je cherche mes fringues, ne les trouve pas, alors j’enfile une sorte de djellaba qui traîne là. Spectacle étonnant une fois la porte du harem poussée : les filles font la fête à l’une d’entre elles, cette dernière tout sourire et se répandant en « merci, merci » à des mots de félicitations des filles parmi lesquelles je retrouve ma chérie.

 

— Qu’est-ce qui se passe ?

— Oh ! Christine, vient ! me répond Antinea. C’est un grand jour pour Leïla. Elle a eu son diplôme d’infirmière !

— Un diplôme ? Ah ? Euh félicitations ! Mais je ne comprends pas ? Un diplôme d’infirmière ici ? Mais comment ???

Devant mon air ahuri, Antinea m’entraîne un peu à l’écart vers une pièce annexe que je n’ai pas eu le temps de voir depuis mon arrivée. Avec surprise, je découvre une salle informatique bourrée d’ordinateurs dernier cri, la plupart en cours de connexion sur l’Internet.

— C’est quoi çà ?

— Eh bien c’est là que les filles font leurs études, ou elles apprennent la théorie de leurs futures activités professionnelles, bien sur ?

— Mais çà va leur servir à quoi dans un harem ?

— T’es bête ! Ça va leur servir à l’extérieur, quand elles s’en vont. Tu fais exprès ou quoi ?

— Comment çà ? Elles peuvent quitter le harem ? Mais je croyais que

Antinea éclate de rire !

— Oh là là, ce que tu peux être conventionnelle Bien sur qu’elles quittent un jour le harem. On n’est plus au quatorzième siècle ! Assied-toi, je t’explique. Ce n’est pas du tout un harem comme tu l’imagines. Hussein n’a jamais acheté ou enlevé des filles pour mieux les violer ensuite. Je crois bien d’ailleurs qu’il n’a jamais baisé aucune d’elle Certaines, c’est vrai lui ont été. disons « confiées » pour diverses raisons. Il y a des coutumes en Arabie qui ont du mal à disparaître. Beaucoup sont des orphelines sans famille qu’il a accepté d’héberger. Il n’exige rien de leur part sauf une chose, qu’elles apprennent un métier qu’elles pourront pratiquer ailleurs quand elles seront prêtes.

— Mais hier soir après le repas, quand on a baisé comme des folles, c’était bien des filles du harem ?

— Oui bien sur, mais elles étaient volontaires. Aucune n’est forcée de quoi que ce soit. Il y en a dans le lot qui ont le feu au cul et toujours partantes pour une séance de baise ! Mais d’autres n’ont jamais participé à une séance de jambes en l’air. Il y en a quelques unes qui sont encore vierge, et d’autre même pas lesbiennes, soupir Et enfin, il y en a quelques unes qui sont entrées volontairement au harem pour des raisons particulières. La blonde là bas par exemple, Ingrid, eh bien elle vient des États Unis et elle fait une thèse de sociologie pour le compte de l’université de Virginie.

— Tu te fous de ma gueule

— Pas cette fois ma chérie. Il arrive que certaines restent dans le pays. Parfois elles sortent pour voir des hommes… Beaucoup d’histoires d’amour ont commencé ici entre ces murs Et quand les unes et les autres ont eu ce qu’elles cherchaient ou atteint un but fixé, ou trouvé l’amour, elles quittent le harem pour se lancer dans le monde. C’est ce qui arrive aujourd’hui pour Leïla qui nous quitte pour prendre un poste qui l’attend dans un hôpital de Florence, en Italie.

— Eh bien Je n’aurai jamais imaginé çà. Et qui supervise leurs études ?

— Magda.

— Magda ?

— Oui. Tu sais, elle est née il y a deux mille ans et elle a acquis forcément un énorme savoir. Et elle continue à apprendre. Elle n’a pas l’air comme çà, mais elle est professeur d’université diplômée à Harvard A y réfléchir, c’est une belle réussite quand on sait qu’au début de sa vie, elle a commencé comme prostituée !

— Magda a été une pute ? Oh, pardon !

— Oui, en Galilée, à l’époque du Christ. Mais c’est une autre histoire.

Je suis médusée. Une fois de plus l’univers des immortels m’apparaît bien plus riche et complexe que je ne l’aurai imaginé. Je regarde cette femme brune, heureuse et souriante, féliciter son élève en lui souhaitant le meilleur dans sa vie future Combien d’autres secrets ais-je encore à découvrir au cours de la mienne ?

Un avion attend Leïla devant le palais, lequel va l’emmener à Riyad ou un autre vol l’emmènera en Italie. Antinea va l’accompagner jusqu’à la capitale du royaume. Pour la circonstance, les deux femmes ont revêtu les traditionnels abaya et niqab, et je ne peux m’empêcher de sourire en voyant ma chérie ainsi vêtue.

— Eh, oh, me lance t-elle, toi aussi tu a adopté le costume local !

— J’ai mis ce que je trouvais. Ou sont passées mes fringues ?

— Ce que tu portais hier soir ? Dit-elle narquoise. Tu les a oubliées dans la salle. Elles sont au lavage. Il faut dire que tu étais dans un tel état hier soir

— Espèce de garce !

— Oui, moi aussi je t’adore, me dit-elle en me faisant un tendre baiser. A demain.

Eh bien non, je ne l’accompagne pas. D’abord, je n’ai aucune envie de me balader avec une toile de tente sur les épaules. Et puis un peu auparavant, Manuel et Jack m’ont proposé d’aller avec eux voir une curiosité géologique voisine du palais. J’ai accepté.

— Tu sais monter à cheval ? Me demande Manuel.

A cheval ? Non mais je leur explique que sur Éden, je me suis souvent promenée à dos de centaure ! Pour cette balade, sur leurs conseils je porte un sarouel et une tunique, et j’ai passé un foulard sur ma tète. Ce n’est pas par convention ou pour une quelconque pudeur, mais le soleil tape dur ! Quant aux deux hommes, ils portent les traditionnels gandoura et keffieh.

— Ça va Christine ? Me demande Manuel. Tu as l’air pensive. Tu n’es pas à l’aise sur le cheval ?

— Oh si, tout va bien. C’est vous deux qui me déroutez. Vous êtes frères, mais je ressens votre énergie et la tienne Manu est infiniment plus forte que celle de Jack. Comment se peut-il?

Les deux frères échangent un regard. Je devine qu’ils ont des consignes concernant les réponses à donner à mes questions.

— C’est parce qu’en réalité, reprend Jack, nous sommes DEMI frères. Nous avons la même mère, mais pas le même père. Emmanuel est le fils du cheikh alors que le mien qui est aussi son père adoptif, était charpentier. Emmanuel est le fils unique du cheikh. On a eu deux autres frères, et trois surs.  Mais à part l’une d’elle qui vit en ce moment aux États Unis, ils ne sont plus de ce monde. Tu sais, il s’est passé pas mal de choses en deux mille ans dans la région

— Oh ? Je suis désolée. Mais pourquoi as-tu dit « Emmanuel » ?

— Parce que c’est mon nom de naissance, reprend ce dernier. Manu n’est qu’un diminutif.

— Ah, OK Et votre mère ?

— Toujours en vie elle aussi. Elle parcourt le monde en faisant de l’humanitaire. Elle est du niveau du deuxième cercle maintenant, mais elle arrive parfois à guérir des malades ou des handicapés, comme un immortel du troisième cercle. Normalement, c’est interdit par notre code, mais notre mère s’en fiche ! Elle te plairait, elle a le même caractère que toi !

Tout en devisant, nous avons quitté le palais au petit trot et nous sommes enfoncés au milieu d’un désert total dans les montagnes à proximité, mélange de roches acérées et de ravines sablonneuses. Pas la moindre trace de vie, pas un buisson, pas un insecte, rien que du silence et du minéral. Et soudain, au détour d’une gorge, je découvre une immense vasque d’eau dont le fond semble se perdre dans les tréfonds de la terre.

— Ça alors ! On se croirait à la fontaine de Vaucluse ! C’est quoi ce truc ???

— La comparaison est bonne, répond Emmanuel, sauf qu’ici, il s’agit d’un ancien tunnel de lave. La région est une zone volcanique active, tu sais ? Et cette eau provient des infiltrations dans les montagnes à des dizaines de kilomètres d’ici et ressort dans cette vasque. Il y a un captage souterrain qui prélève l’eau qui irrigue le palais et ses environs.

Waw La vasque fait bien dans les vingt mètres de diamètre. Un bleu profond, une eau cristalline, tout incite à la baignade !

— On peut faire plouf ? Dis-je toute excitée.

— Bien sur, on est là pour çà.

Il ne me faut que quelques secondes pour sauter du cheval et me débarrasser de mes vêtements. Je ne prend pas le temps de tâter l’eau, je plonge directement. Avec délice, je me laisse couler. Je prends mon aspect de sirène et en quelques battements de queue, pars en exploration vers les profondeurs obscures. Mais je ne vais pas loin. On ne voit rien, on ne sent rien, il n’y a pas la moindre trace de vie dans ces eaux. Quelques fines bulles s’échappent d’une fissure de la paroi, rappelant l’origine volcanique de ce trou d’eau, c’est tout. Je remonte et reprend mon aspect habituel.

— Punaise qu’elle est bonne ! Dis-je aux deux hommes. Allez venez vite !

Emmanuel et jack se mettent à rire. Ma joie doit faire plaisir à voir. Ils se débarrassent de leurs vêtements se retrouvant ainsi aussi nus que moi. C’est vraiment de beaux gars ! La trentaine athlétique, bruns et musclés, un système pileux abondant sans être excessif, et alors des membres de style « waw » qui me font déjà fantasmer sur ce qu’ils seront s’ils passent en érection !

Et je suis d’humeur joueuse ! Je les asperge, je leur envoie de l’eau, je me fais inonder en retour. On est comme trois gamins. On s’amuse, on joue. Ils ne mettent pas longtemps à m’attraper et à me projeter dans la vasque. Je me laisse faire en riant. Je reviens à la charge, cherche à les déséquilibrer à mon tour, ce qu’ils acceptent de me laisser faire parfois. Je prends bouillon sur bouillon. On en profite pour se frotter un peu, nos jeux deviennent carrément érotiques. Ils commencent à bander dur. Je suis aux anges.

Et puis j’avise la falaise qui surplombe la vasque sur presque tout le tour. Il y a bien une quinzaine de mètres.

— On peut monter là haut les garçons ?J’ai envie de plonger !

— Oui, viens.

Ils m’entraînent à leur suite par un sentier de chèvre qui escalade presque à pic une des parois. Ils me donnent la main pour les passages délicats. Il serait tellement facile de se muer en oiseau. Mais Jack ne le peux pas… Et c’est tellement plus jouissif de le faire comme des humains normaux ! L’un me tire, l’autre me pousse, ils en profitent un peu au passage, et nous atteignons le sommet de la falaise. Et j’éprouve un choc…

Il y a tellement de gens qui disent avoir été saisis par la magie du désert. C’est mon tour. Depuis le sommet de la falaise, la vue porte à des kilomètres, avec comme seule vision un ciel d’un bleu profond sans le moindre nuage et une étendue de rocailles et de dépôts cendreux, vierge de toute vie. Je fais quelques pas dans la poussière. Tout est d’une virginité totale. Un petit vent s’est levé, mes cheveux ondulent sous le souffle brûlant. Je suis dressée, nue, au milieu du désert avec comme unique compagnie mes deux compagnons aussi nus que moi. Mon regard va de l’un à l’autre, d’un membre dressé à l’autre. Je me coule entre eux, laisse leurs mains s’aventurer sur mon corps. Je caresse leur toison à tour de rôle, puis mes mains descendent sur leur membre, les caressant doucement. Je m’agenouille dans la poussière. Ma bouche s’ouvre, les accueille sans opposer de résistance. Ils sont fermes, savoureux, je me délecte, excitée par leurs mains qui me caressent la tète, les épaules, le torse, les seins.

Et puis je m’allonge sur un lit de cendres volcaniques, dures, acérées. Le sol est brûlant mais je n’en ai cure. L’un après l’autre, les deux hommes me prennent, me pénètrent, je donne du plaisir à l’un avec ma bouche pendant que j’accueille largement l’autre. Nous ne sommes plus que trois animaux primitifs, comme aux premiers temps du monde, uniquement guidés par l’instinct, par le désir érotique, par l’appétit sexuel, mais décuplé par notre statut d’immortel. Je souffre, ils me font mal, j’adore çà ! Je gémis, je rugis, je crie après chaque jouissance. Ils me remplissent, çà déborde. Nous sommes en nage, nous faisons voler la poussière, nos corps se marquent cendre humidifiée par nos sécrétions. Ça vire au duel. Je leur saute dessus, je m’empale, décidée à leur faire mal, je leur arrache des cris de douleurs.

Et puis Je sens nos énergies qui fusionnent, qui deviennent une seule. Je ressens leurs sensations comme ils ressentent les miennes. C’est dingue, je ressens ce que ressens Jack, ce que ressent Emmanuel, tout comme ils ressentent les miennes. Nous sentons venir une ultime jouissance commune, les trois, qui monte, monte simultanément et qui nous fait crier tous les trois d’une seule voix, un rugissement bestial qui se répand à la ronde.

On s’est effondré dans la poussière J’ai eu un étourdissement. Eux aussi. C’est comme si on navait fait plus qu’un, une seule personne. Nous reprenons progressivement notre lucidité, notre respiration se calme, les halètements s’apaisent.

— Mais c’est dingue ce truc ! Dis-je. Mais qu’est ce qui s’est passé ???

— Nos esprits ont fusionné, réponds Emmanuel en souriant. C’est quelque chose qui peut se produire chez les immortels de notre niveau, de façon aléatoire quand nous perdons totalement notre self-control. Pendant quelques instants, ton esprit a été aussi dans notre tète, tout comme nous avons été dans la tienne. Un seul esprit dans trois corps en même temps. C’est ce que mon père a fait au début de ma vie.

— Comment cela ? Dis-je intriguée.

— Eh bien mon père n’obtenait que des échecs. Il s’est alors demandé si ses échecs n’étaient pas dus à sa méconnaissance de la vie humaine et de ses contraintes. Après tout, fils d’Ouranos, il était dieu de naissance avec tous les pouvoirs qui l’accompagnent. Alors il m’a engendré, pour vivre en esprit dans mon corps.

— Tu es son fils unique, c’est bien çà ?

— Oui. Il a fécondé une jeune fille vierge, et dès ma naissance, tout ce que j’ai vécu et ressenti, il l’a ressenti également. Très tôt, il m’a parlé en esprit, m’a appris mon origine, donné sa connaissance,  en me demandant d’instruire mes contemporains de son enseignement. Il espérait qu’avec moi, non sujet aux défaut des dieux car mes pouvoirs étaient inactifs de par sa volonté, comprenant mieux les hommes que lui, son enseignement passerait mieux auprès d’eux. Au début çà a marché, mais au bout de quelques temps çà s’est mal terminé.

— Comment cela ?

— J’avais beaucoup de fidèles. Les autorités ont fini par s’en émouvoir. Je devenais une menace. Alors j’ai été arrêté, emprisonné, torturé et condamné à mort. Je te fais la version courte, çà reste un sale souvenir.

— Et çà s’est terminé comment ?

— A la fin de mon supplice, mon père ayant tout ressenti comme moi a décidé que c’était assez Il n’y avait rien à attendre des hommes. Il m’a fait plonger dans un état de mort apparente, et une fois déposé dans un tombeau, il m’a réveillé, et salut ! Je suis venu me réfugier auprès de lui dans le désert avec ma mère et mes frères et surs auxquels il a fait don des facultés du premier cercle des immortels. Mon statut du quatrième cercle a été réactivé et depuis nous vivons notre vie en regardant évoluer le monde. Pas fameux. Et voilà

Je me lève. La tète me tourne. Je fais quelques pas laissant tourner dans ma tète ce que vient de me révéler Emmanuel. Qu’est-ce qui cloche, bon sang ? Et puis quelque chose attire mon regard. Tiens ? Ah si, il y a de la vie ici. Je m’agenouille devant un buisson chétif à l’aspect desséché.

— Qu’est-ce que tu as trouvé Christine ?

— C’est un rosier sauvage Il est mourant. Il s’est battu pour vivre, je le sens. Il a plongé ses racines aussi loin qu’il a pu à travers les fissures des rochers, mais il est à bout de forces. Il ne peux plus Attends mon ami, je vais t’aider. Reçois mon énergie, laisse moi guider tes racines, oui. Comme çà. Encore un peu Oh ! Tu sens comme tes racines viennent d’atteindre l’eau ? Maintenant tu peux reverdir mon ami !

Sous nos yeux, le rosier se redresse lentement. Des feuilles vertes apparaissent et la pointe de ses rameaux se couvre de boutons de rose qu’une abeille venue on ne sait d’où entreprend de butiner.

— Tu es vraiment étonnante Christine Mais comment tu as fait pour le vent ?

— C’est rien ! Juste quinze ans d’entraînement. Le vent ? Qu’est ce que tu racontes ? Allez, on va s’amuser les garçons, donnez moi la mains. A trois ! Un, deux wahouuuuuu !

Et après quelques secondes de vol plané, nous disparaissons dans la vasque dans une triple gerbe d’eau.

Épisode à suivre

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