Suite aux événements survenus sur l’Océane, notre petit groupe de quatre, composé d’Ayaka, MissMalice, Detsuky et moi-même, se rendit dans le centre Pokémon de Carmin-sur-Mer. Nos Pokémon n’étaient pas spécialement blessés, mais c’était une habitude que nous avions prise lors de nos parties respectives sur les différentes versions console des jeux Pokémon, quand nous revenions au dernier centre Pokémon visité en cas de défaite. Une habitude qui nous permettait de nous rappeler que, en temps normal, perdre ne rimait pas avec mourir.

Lorsque chacun de nos Pokémon fut soigné, nous allâmes nous installer dans le coin inférieur droit du centre de soins, sur des bancs en bois disposés dans un coin de la pièce, autour d’une table basse, en bois également. Deux PNJ y étaient déjà assis : une femme et un homme. Nous ne nous en souciâmes guère : les PNJ pourraient ne pas exister qu’il n’y aurait aucune différence, à moins, bien sûr, que nous ne leur parlassions. Nous restâmes assis, deux sur chaque banc, nos curs lourds d’émotions négatives. Ma tête me tiraillait tandis que je repensais à la coulée de l’Océane. J’en arrivais presque à sentir le sol trembler, à l’instar du pont s’élevant dans le ciel tandis que le bateau, aussi majestueux eût-il été, sombrait dans un océan glacial. Je goûtais également, non pas sans un mal-être certain, à la salinité de l’eau que j’avais traversée à la nage. Puis vint l’annonce de la mort de M.A.nuel. J’ignorais totalement qui était ce joueur : je ne connaissais ni son visage, ni sa voix, ni quoi que ce fût d’autre de lui. Une troisième personne était décédée à cause de ce jeu assassin, le tout sous les yeux pervers d’un scientifique psychopathe. Toutes ces données se bousculaient dans ma tête, si bien que, sans que je m’en rendisse compte, une grimace se forma sur mon visage.

-RedCliff ? s’inquiéta Ayaka, assise à côté de moi, en posant sa main sur mon épaule.

Je ne lui répondis pas. Je me contentai de lever la tête afin que mes yeux rencontrassent les siens. Dans ses iris marron transparaissaient ses craintes, qu’elle avait en commun avec moi.

-Je vais bien, parvins-je à articuler en la prenant maladroitement dans mes bras.

Nous restâmes ainsi, pendant de longues minutes, jusqu’à ce que Detsuky brisât ce silence des plus pesant.

-Je me doute que vous ne me faites pas confiance, entama-t-il. Vous seriez même idiots de croire en moi sachant ce que la majorité des bêta-testeurs pense de toi, RedCliff. C’est pourquoi je ne vous demanderai pas de me croire sur parole, mais simplement d’écouter ce que j’ai à vous dire.

Detsuky, rajustant ses lunettes tombant sur ses yeux, regarda rapidement dans la direction de chacun d’entre nous.

-Je pense que vous vous en doutez, mais les autres joueurs veulent t’éliminer, RedCliff.

Cette nouvelle ne me surprit pas. Au contraire, je le savais depuis la mort de Pika-sama.

-Mais comme vous le savez, mise à part Ayaka ici présente, poursuivit-il en tendant sa main vers ma petite-amie, aucun d’entre eux ne peut être certain de te battre. D’ailleurs, et c’est principalement de cela dont ils ont parlé sur l’Océane, si quelqu’un t’affrontait, rien ne garantirait à cette personne que le fameux « bug » ne se reproduirait pas.

Ce détail, en revanche, je l’avais oublié. Effectivement, si Secoya m’avait sauvé la vie contre Ondine, il pourrait très bien recommencer avec un autre joueur.

-C’est pour cette raison qu’ils ont décidé de te tuer en employant d’autres moyens, reprit-il.

-Qu’est-ce que tu veux dire par « d’autres moyens », l’interrogea Ayaka, redevenue inquiète.

-Ce que je veux dire, c’est qu’ils vont essayé de l’assassiner, tout bonnement et simplement.

Évidemment, pensais-je. C’était leur seul moyen sûr et efficace d’en finir avec moi. Cela me parut tellement évident que je me pris à me demander comme j’avais pu ne pas le voir plus tôt.

-Maintenant que vous êtes prévenus, il va falloir faire attention : s’ils doivent blesser l’un de nous pour atteindre RedCliff, ils n’hésiteront pas. En gros, c’est un nouveau cauchemar dans lequel nous venons de plonger.

-Donc, c’est moi qui y vais en premier ? demanda Detsuky.

Nous hochâmes la tête. Tous les quatre regroupés devant une maison aux murs en briques rouges bordée par la mer, Detsuky y entra. Il en ressortit environ deux minutes plus tard, puis MissMalice en fit de même. Vint alors le tour d’Ayaka, et enfin le mien. Lorsque nous eûmes tous récupéré notre « Bon de Commande », nous quittâmes Carmin-sur-Mer pour revenir vers Azuria. Marchant tous ensemble, nous prîmes à revers la route que nous avions empruntées peu de temps après avoir vaincu Ondine, le second champion d’arène. Pendant que nous marchions,  Ayaka enroula ses bras autour du mien, si bien que je ne pus m’empêcher de me demander par quel miracle elle parvenait à ne pas trébucher.

-J’ai peur, admit-elle en enfouissant sa tête contre mon épaule.

Je m’arrêtai rapidement et l’embrassai sur le front. Les autres, qui n’avaient pas fait attention à nous, n’avaient pas vu que nous étions arrêtés ; ils s’éloignaient progressivement vers le tunnel qui les mènerait tout droit à Azuria.

-Ne t’en fais pas, lui dis-je calmement. Nous sommes lancés dans le jeu, maintenant. Je doute que de simples IA puissent

-Je n’ai pas peur du jeu, me coupa-t-elle fébrilement. J’ai peur de DragonChild. J’ai peur de ce qu’il te prépare.

Je fermai les yeux en réfléchissant à quoi lui répondre. Je ne pouvais me mentir à moi-même, j’étais également effrayé par la simple idée de savoir qu’un humain, dans le même pétrin que moi, voulait me voir mort. C’est une sensation que personne ne devait avoir à connaître, la sensation que votre vie peut prendre fin sans que vous ne puissiez rien y faire.

-Ne t’en fais pas, tentai-je de la rassurer. Il ne me fera rien.

-Ce n’est pas la peine de me mentir, Clifford, répondit-elle en plongeant son regard dans le mien. Je sais que rien ne va. D’abord ce jeu de merde, puis ce « bug », et enfin DragonChild qui menace de te tuer.

Elle replongea son visage sur mon épaule tandis qu’elle fondit en larmes.

-Je ne veux pas te voir partir, articulait-elle difficilement. J’ai peur de te voir partir.

Je ne répondis rien. Je me contentai de poser ma main libre, celle qu’Ayaka ne gardait pas prisonnière dans ses bras, contre son dos. Elle se blottit plus encore contre moi, et je lui rendis son étreinte. Nous restâmes ainsi, comme si le temps s’était arrêté, pendant plusieurs minutes. Puis, lorsqu’Ayaka cessa de pleurer, elle releva son visage dont les yeux, parsemés de veines rouges, brillaient encore.

-Je ne le laisserai pas faire, lui promis-je. Je ne le laisserai pas nous séparer. Je ne laisserai rien nous séparer.

Elle hocha lentement la tête, et je l’embrassai.

Nous fûmes de retour à Carmin-sur-Mer, chevauchant les bicyclettes que nous avions été récupérer à Azuria. Bien que je haïsse par-dessus tout le professeur Secoya pour nous avoir envoyés dans un jeu mortel, je devais reconnaître qu’il avait eu le soucis du détail en codant ce jeu : le vent venant me caresser le visage tandis que nous roulions à pleine allure sur nos bicyclettes m’avait fait un bien fou.

-Bon, il ne reste plus qu’à aller chercher Flash, dit MissMalice tandis que nous descendîmes de nos bicyclettes.

Nous appuyâmes sur un bouton situé sur le guidon de nos nouveaux vélos, et ils disparurent pour se ranger, dieu seul savait comment, dans nos sacs respectifs. Encore un détail non négligé par le professeur Secoya.

-Tu ne veux pas affronter le Major Bob avant d’aller la chercher ? lui demanda Ayaka.

-Ça nous fera un petit entraînement en plus, répondit la jeune blonde.

Tous convaincus, nous nous dirigeâmes vers l’est. Nous arrivâmes alors au niveau du quai, celui que nous avions utilisé pour grimper dans l’Océane, désormais épave au fond de l’océan. En face du quai se trouvait une sorte de petite montagne. Une ouverture, obscure, nous permettait d’entrer dans la grotte appelée Cave Taupiqueur, nommée d’après le Pokémon éponyme que l’on trouvait sans difficultés à l’intérieur. Nous y entrâmes.

-Putain, on voit que dalle, là-dedans, se plaignit Detsuky.

Il avait raison. La grotte était on ne pouvait plus sombre. Je ne voyais rien, pas même Ayaka, toujours cramponnée à mon bras.

-Tout le monde est là ? résonna la voix de MissMalice.

Nous lui répondîmes tous, puis nous nous mîmes à traverser cette grotte qui, dans les jeux originaux, était beaucoup plus claire.

Nous fûmes de retour à Carmin-sur-Mer bien plus rapidement que ce que je n’avais imaginé. La Cave Taupiqueur, mise à part l’obscurité des lieux, n’avait rien d’exceptionnel, si bien que nous ne fûmes pas retenus bien longtemps dans ce sinistre endroit. La capacité Flash, permettant d’éclairer les lieux sombres, se trouvait dans une habitation, au sud de la sortie de la grotte, dans un petit espace vert rempli de hautes herbes ne comportant rien de bien intéressant, non loin de la ville d’Argenta. Il était d’ailleurs possible de rejoindre la ville grâce à la capacité Coupe. J’en avais d’ailleurs profité pour aller chercher le Vieil Ambre, qui me permettrait, lorsque nous aurons atteint Cramois’Ile, la ville de la septième arène, de récupérer le Pokémon Ptéra.

Nous nous trouvions désormais au centre Pokémon de Carmin-sur-Mer. J’étais assis sur le même fauteuil qu’avant notre départ vers la Cave Taupiqueur. Ayaka, MissMalice et Detsuky avaient insisté pour que nous nous y rendissions pour une quelconque raison qu’ils gardaient pour une surprise, m’avaient-ils dit. Trois voix l’emportent sur une seule, alors je les accompagnai. Mes trois amis me laissèrent là, à attendre bien sagement, pendant qu’ils montèrent à l’étage. Ils revinrent après cinq minutes environ. Je tentai de leur demander ce qu’ils avaient fait, mais ils ignorèrent ma question.

-Bon, il serait temps d’aller massacrer ce bon vieux Bob, vous ne pensez pas ? nous demanda Detsuky.

Aucun de nous ne refusa l’idée. Après tout, plus vite finirions-nous ce jeu maudit, plus vite pourrions-nous rentrer chez nous et, évidemment, régler nos comptes avec le professeur Secoya.

    Nous entrâmes dans le bâtiment ressemblant trait pour trait aux précédentes arènes. Imposante, celle-ci arborait une Pokéball entourée d’étincelles juste au-dessus de la porte automatique qui ne tarda pas à s’ouvrir lorsque nous nous approchâmes suffisamment. Lorsque la porte se referma silencieusement derrière nous, nous sentîmes toute la tension de l’arène nous picorer la peau. Les murs, peints en jaune afin de nous rappeler que le champion, le dénommé Major Bob, était spécialiste des Pokémon de type Électrik (non, ce n’est pas une faute, le type « Électrik » se termine bien par un « -k »). Ce dernier nous attendait, tout au bout de l’arène. Nous avançâmes vers le géant aux cheveux blonds coiffés en pics. Il arborait, contrairement aux jeux vidéo, une tenue entièrement kaki aux motifs de l’armée.

-Je te laisse commencer, Detsuky, dit MissMalice en ne lâchant pas du regard le champion d’arène posté à une dizaine de mètres devant nous.

Detsuky se contenta de sourire, puis il s’avança pour rejoindre les traits, tracés en blanc, sur le sol de l’arène. Il se plaça dans un rectangle de craie ; Major Bob se mit alors à parler.

-Un challenger ! rugit-il. Cela faisait bien longtemps que personne n’avait tenté d’affronter le Major Bob

-Il va continuer de parler de lui à la première personne, vous pensez ? demandai-je aux autres, amusé.

-Pendant la guerre, mes

-Blablabla, le coupa Detsuky. Je connais le refrain. Pendant la guerre, tes Pokémon t’ont sauvé en paralysant tes ennemis.

-Je vois que mes exploits ont atteint tes oreilles, rit bruyamment le champion. Mais je déteste les jeunes effrontés qui me manquent de respect !

-Bon sang, je rêve ou une IA vient d’adapter sa réponse en fonction de ce qu’a dit un joueur, dis-je, surpris d’entendre la réponse de Bob.

Ayaka et MissMalice se contentèrent de hausser les épaules.

-Je suppose que ça fait partie de la réalité virtuelle, me répondit simplement ma petite-amie qui, depuis le centre Pokémon, avait réussi à me lâcher le bras. Non pas que je ne voulusse plus d’elle, au contraire, mais la voir dans cet état m’inquiétait sérieusement.

Lorsque je reportai derechef mon attention sur le combat, Detsuky venait d’envoyer son Pokémon. Une créature, ressemblant fortement à un rocher possédant deux bras et deux jambes, me tournait le dos.

-Grolem ! me retins-je de crier. Mais depuis quand ?

-Tu crois vraiment que nous sommes allés à l’étage du centre Pokémon pour te laisser tout seul, sans aucune raison ?

Comment avais-je pu ne pas le voir ? J’aurais dû m’en douter immédiatement : un Gravalanch n’évoluait en Grolem que par le biais d’un échange. C’était donc cela qu’ils avaient fait. Ils avaient fait évoluer leur Gravalanch. Et sans doute Ayaka avait-elle fait évoluer son Mackogneur.

-Grolem, ampleur ! intima Detsuki à son Pokémon.

Grolem étant un Pokémon évolué au maximum, ses statistiques étaient incroyablement élevées par rapport à celles du pauvre Voltorbe, petit Pokémon en forme de boule rouge et blanc, mis K-O en une seule attaque. Il en fut de même pour le Pikachu qui le remplaça. Vint enfin le fameux Raichu, mais face à un Pokémon de type Sol, totalement immunisé aux attaques de type Électrik, le combat se conclut rapidement. Detsuky récupéra alors son troisième badge sans avoir éprouvé la moindre difficulté.

La suivante à se battre fut MissMalice. Puisque cette dernière possédait elle-aussi un Grolem, le combat ne dura que quelques secondes, et elle put repartir avec son badge Foudre. Ce fut alors le tour d’Ayaka. Bien qu’elle n’eût pas de Grolem, elle avait désormais un Makogneur, la forme évoluée de Machopeur. Mackogneur, un Pokémon aux muscles déformant sa peau, possédait quatre bras, mais il possédait surtout une statistique d’Attaque extrêmement élevée. Ainsi, ce seul Pokémon vint à bout des trois pauvres créatures du champion qui dut, pour la troisième fois, remettre son badge à un challenger.

Ce fut alors mon tour, mais mon Tygnon, possédant une défense spéciale très élevée, si bien que les attaques Électrik n’étaient pas un danger, et mon Ortide, dont la forte défense spéciale et la résistance du type Plante aux attaques Électrik, empêchaient les Pokémon du champion d’être bien dangereux. Tandis que Tygnon mit K-O les deux premiers Pokémon sans aucune difficultés, Ortide s’occupa du Raichu. Après plusieurs tours à subir l’empoisonnement dû au Poudre Toxik, ainsi que le drain de HP de Vampigraines, ce dernier succomba, me permettant ainsi d’obtenir mon troisième badge.

-Si tous les champions pouvaient être si simples, rîmes-nous en sortant de l’arène.

-Ça devrait être le cas jusqu’au cinquième badge, je pense, commenta MissMalice. Erika pourrait même être encore plus simple à battre que le Major Bob.

-Je ne pense pas que Koga sera un énorme problème, poursuivis-je. Il faut juste battre son Grotadmorv avant qu’il ne fasse trop de Lilliput,

-Par contre, soupira Ayaka, Morgane risque d’être dangereuse. Pour vous, du moins. Mon Léviator ne devrait pas perdre contre son Alakazam.

Nous continuâmes de discuter de la suite du jeu, nous extasiant en nous rappelant que, d’après nos souvenirs vidéoludiques, les deux premières arènes étaient les plus difficiles du jeu. Mais, bien sûr, la question était de savoir si Secoya ne nous avait rien concocté sur le chemin.

-Je vois que tu t’amuses, assassin, résonna alors une voix devant nous.

C’était DragonChild. Son Reptincel, Pokémon ressemblant à une salamandre bipède ayant le bout de sa queue enflammée, se tenait à côté de lui.

-Mais ton parcours s’arrête ici ! Reptincel ! Lance-flamme !

Son Pokémon obéit, et aussitôt une colonne de flammes fondit sur moi. J’eus à peine le temps de bouger que quelqu’un me bouscula sur le côté. J’étais sain et sauf, mais celui ou celle qui m’avait sauvé avait reçu l’attaque à ma place. Dans la panique, je ne réagis pas. Mais lorsque je reconnus le visage d’Ayaka, désormais en proie aux flammes, mon sang se figea d’effroi.

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