Seul dans son bureau, Monsieur le Principal était en proie au plus violent embarras.
Au loin, la cloche retentit. Aussitôt, le lycée entier fut ébranlé, tandis que des milliers de chaises étaient brutalement déplacées, que les portes des salles de classe s’ouvraient à la volée, et que des pas innombrables se mettaient à courir le long des couloirs, que des cris s’élevaient. Il était dix-sept heures. Comme chaque jour à cette heure, l’établissement subissait l’hémorragie galopante de ceux qu’il abritait.
Monsieur Darrièges, lui aussi, aurait aimé quitter son bureau, se précipiter dans sa voiture et rentrer chez lui. Quoique. La perspective de passer une nouvelle soirée déprimante, certainement devant la télévision, en compagnie de sa femme et de son fils, n’avait rien d’enthousiasmant.
De toute façon, la question ne se posait pas pour le moment. Il avait encore une affaire à régler, et ça n’allait pas être de la tarte. Dans sa tête, des pensées déprimantes se remirent à tourner : ’ Je ne suis pas fait pour ce travail. Je ne suis pas assez énergique, assez proche des élèves, assez à l’aise avec eux. Ou alors il aurait fallu qu’on me colle dans un établissement plus calme. N’importe lequel, mais pas celui-là. ’
Le matin avait été plutôt calme : il avait pu se consacrer aux tâches administratives, répétitives et sans intérêt, mais qu’il se savait capable d’accomplir. Par contre, l’après-midi avait été éprouvant : il y avait eu cette affaire de racket, et une enseignante d’anglais, Madame Boudet, avait été bousculée et insultée dans un couloir. Les profs menaçaient de se mettre en grève, et Monsieur le Principal Darrièges avait dû subir leurs doléances pendant de longues heures.
’ Quand est-ce qu’ils se rendront compte que je suis totalement démuni, moi aussi ? Et qu’en plus je suis totalement incompétent ? Combien de temps encore vais-je arriver à faire illusion ? ’
Et maintenant, comme si ça ne suffisait pas, voilà qu’il avait encore à régler ça. Mon Dieu, que leur avait-on fait, à ces jeunes de la nouvelle génération, pour qu’ils soient enragés à ce point ? Il ne se souvenait pas avoir jamais été aussi violent et irrespectueux quand il était lui-même adolescent.
Le silence s’était fait dans le grand établissement. On aurait dit un silence de prison désaffectée. Darrièges frissonna. Il fallait vraiment qu’il ait le cafard pour aller s’inventer des métaphores pareilles !
Soudain, quelqu’un frappa à la porte. Tant mieux, finissons-en maintenant. Plus vite ce sera fait, plus vite il serait rentré chez lui.
Xavier, le jeune étudiant ombrageux qui s’occupait ce soir-là du secrétariat de scolarité, ouvrit la porte, passa la tête par l’ouverture, et demanda à Monsieur le Proviseur :
’ Les petites Dia et Marin sont là, Monsieur. Je les fais rentrer tout de suite ? ’
Darrièges acquiesça. Aussitôt la porte s’ouvrit toute grande pour laisser passer les deux lycéennes. Ainsi les voici, celles par qui le scandale était arrivé. Il les avait entr’aperçues bien des fois, bien sûr, parmi les élèves de terminale. Mais jusqu’alors elles ne lui avaient posé aucun problème particulier. Elles étaient plutôt calmes et travailleuses, d’après ce qu’il croyait savoir. En tout cas, pas plus feignantes et impertinentes que leurs camarades de classe.
’ Je vous en prie, Mesdemoiselles, asseyez-vous ’, leur dit-il en désignant les deux chaises devant son bureau, tandis que Xavier sortait et refermait la porte derrière lui.
Monsieur le Principal passa une brève seconde à examiner les deux spécimens qui se présentaient à ses yeux. Les petites Dia et Marin, avait dit Xavier ? Quelle drôle d’idée que de les appeler petites ! Au contraire, elles étaient étonnamment grandes et élancées, bien plus que lui en tout cas, avec ses un mètre soixante-dix tout rond.
Il eut une drôle d’impression, tout à coup. Celle de se tenir face à face avec la même personne, mais dédoublée et inversée. Véronique Marin et Lucille Dia étaient splendides, leur corps avait atteint une magnifique maturité. Elles étaient toutes deux des femmes superbes et achevées. Mais elles étaient si différentes ! Lucille Dia était une jeune fille dont la peau avait une couleur noire intense et belle. Elle semblait solide et forte, avec des formes athlétiques admirables qui transparaissait à travers ses vêtements moulants. Au contraire, le teint de Véronique Marin était d’une blancheur presque translucide, elle avait un corps fragile, une longue chevelure blonde et de grands yeux qui lui mangeaient la moitié du visage, et un air innocent et angélique. La panthère et la sainte : quel duo !
Les yeux de Monsieur le Principal passèrent fugitivement sur les seins épanouis de ces deux nymphes qui lui faisaient face. Se superposant à cette vision de rêve, une image lui vint à l’esprit : celle, grotesque et déplacée, de sa propre femme, nue, adipeuse, les seins maigres et tombants. Sa femme qu’il irait retrouver ce soir, et à qui il s’efforcerait de jouer la comédie du mari aimant. Comme tous les soirs, depuis d’innombrables années.
Mais ce n’était pas le moment de penser à ça. Il s’aperçut soudain qu’il était silencieux depuis un peu trop longtemps, et que son trouble avait pu transparaître. Se reprenant, il se racla la gorge, réfléchit à ce qu’il allait avoir à dire, et se lança :
’ Mesdemoiselles, vous vous doutez certainement de la raison qui m’a fait vous convoquer dans mon bureau. ’
Aucune réponse. Les yeux des deux jeunes filles ne révélaient rien de ce qu’elles pensaient. Il poursuivit :
’ Vous n’êtes pourtant pas sans savoir [Bon Dieu, les expressions qu’il employait ! Il devait leur paraître totalement préhistorique, à ces deux jeunes filles de la génération rap et techno.] que notre établissement a reçu plusieurs plaintes de parents d’élèves vous concernant. ’
Toujours aucune réaction. Il se sentait de plus en plus nerveux. Que cette situation était embarrassante !
’ Comprenez-moi bien. Il n’est pas dans mon intention de vous. Enfin, de vous empêcher de pratiquer. enfin je veux dire que votre vie privée de me regarde pas, mais vous devez bien comprendre. ’
Houla, ça n’allait plus, là. Il perdait ses moyens. Il vit un sourire se dessiner sur les lèvres de Lucille Dia. Elles devaient le trouver ridicule. Il se sentit rougir dramatiquement, pour tout arranger. Mais pourquoi fallait-il que ce genre de choses lui arrive à lui ?
’ Ce que je veux vous dire, c’est qu’à l’avenir il serait préférable de ne plus vous embrasser en public, spécialement à la sortie du lycée. ’
Voilà, c’était enfin sorti. Il s’en sentit grandement soulagé. Il se détendit un peu, et attendit une réaction, en s’efforçant de prendre un air sévère. Un air d’adulte sûr de lui et responsable. Un air de Monsieur Le Principal.
Véronique Marin prit enfin la parole : ’ Je ne comprends pas de quoi vous voulez parler, Monsieur le Principal. ’ Avec un air d’ingénuité absolue, et ses grands yeux qui semblaient refléter toute l’incompréhension du monde. ’ Vous voulez dire que ça gêne les gens quand on s’embrasse ? On est pourtant tout à fait discrètes, vous savez. ’
Lucille Dia enchaîna, sur un ton un peu plus agressif : ’ Et puis, vous savez, il y en a pleins des jeunes qui s’embrassent devant les grilles du lycée. Pourquoi ils sont pas dans votre bureau avec nous, eux aussi ? ’
Darrièges ne s’attendait pas à ça. Il bafouilla : ’ Eh bien, je veux dire. enfin. ’
Véronique le coupa : ’ Vous voulez que c’est plus gênant quand ce sont deux filles qui s’embrassent ? Pourtant, cela n’a rien de choquant, non ? Cela vous choque vous ? ’ Et, à peine ces mots prononcés, elle se pencha sur son siège et vint se coller contre sa camarade. Elles fermèrent les yeux, leurs lèvres s’unirent et elles se mirent à s’embrasser, là, devant lui, dans son propre bureau. Il en resta pantois, ne sachant plus que dire ni que faire. Au fur et à mesure, le baiser des deux jeunes filles se faisait plus passionné, plus langoureux, plus intense. Lucille entoura la tête de son amie de ses deux longues mains sombres et elle la pressa plus encore contre son visage. Leurs langues couraient l’une contre l’autre, forçaient leurs lèvres, s’enfonçaient à l’intérieur de leurs joues, en un fascinant ballet.
Darrièges, devant ce spectacle enchanteur, sentit une érection se dessiner dans la fournaise de son bas-ventre. Il s’efforça de refouler toutes les idées qui étaient en passe de l’embrouiller, rassembla ses esprits pour reprendre son contrôle.
Les deux jeunes filles se séparèrent soudain, un peu haletantes, le regard un peu plus fixe. ’ Alors, reprit aussitôt Véronique, vous, vous trouvez ça choquant ? ’ Avec un sourire pervers. Le sourire d’une femme qui cherche à allumer un homme et qui sait qu’elle y parvient sans difficulté.
’ Vous comprenez, enchaîna Lucille, il nous arrive parfois, même en public, au milieu d’amis par exemple, d’aller beaucoup plus loin. Et personne ne s’en est jamais plaint. ’ Joignant le geste à la parole, elle avança une main contre le chemisier de son amie et se mit à lui pétrir lentement les seins. ’ Vous voyez ? On fait ce genre de choses. ’ Le visage de Véronique s’était empourpré, et sa poitrine s’était soulevée à ce contact voluptueux. Les pointes de ses seins transparaissaient à travers l’étoffe.
’ Vous vous plaignez, vous, Monsieur le Principal ? ’ continua Lucille en scrutant le visage de son interlocuteur, sans pour autant cesser son activité. Celui-ci, totalement dépassé, ne répondant rien, elle dit : ’ Le mieux, c’est qu’on vous montre tout ce qu’on sait faire, et puis si vous êtes choqué, alors vous nous le direz, d’accord ? ’
Et sans attendre de réponse, elle se leva de son siège et s’assit sur les genoux de Véronique. Celle-ci entreprit aussitôt de remonter le chandail moulant de son amie, découvrant une paire de seins d’ébène magnifiquement sculptés. Et elle se mit à en titiller les tétons durcis à l’aide de sa langue, tandis qu’aidée de Lucille, elle déboutonnait tranquillement son propre chemisier.
Cette fois, c’était sûr : Monsieur Le Principal Darrièges bandait. Deux voies s’offraient à lui : soit se mettre à hurler au scandale et ameuter tout le personnel restant dans l’établissement (mais même s’il s’expliquait en large, en long et en travers, sa réputation serait foutue) ou bien trouver assez d’autorité pour faire cesser à ces jeunes effrontées leur petit manège.
Il y avait bien une troisième solution, plus tentante, mais il n’osait même pas y penser, de peur de succomber à cette tentation. En attendant, la visage cramoisi, les mains tremblantes et le sexe durci, il assistait impuissant et passif au spectacle qui s’offrait à lui.
Leur magnifique poitrine maintenant totalement découverte, les deux jeunes filles s’enlaçaient sensuellement, blanc contre noir, noir contre blanc. Chacune pressait ses seins contre ceux de l’autre, chacune pressait sa bouche contre celle de l’autre. La main de Lucille, courant sur le ventre de Véronique comme un petit animal noir à travers un désert plat et blanc, s’enfonça d’un coup sous la petite culotte de son amante, formant ainsi une petite bosse mouvante et travailleuse. Les deux filles gémissaient doucement maintenant, se branlant réciproquement, jetant parfois des regards provocants à leur Principal.
Celui-ci, n’y tenant plus, se leva lentement, comme un mort-vivant, contourna pesamment son bureau et vint se placer devant la chaise où s’ébrouaient les jeunes amantes. Interrompant aussitôt l’exploration des charmes de Véronique, Lucille s’en détacha et s’accroupit devant Darrièges, et n’eut que quelques manipulations à faire avant que ne se déroule à l’air libre le long instrument violacé et congestionné. Elle en tâta en connaisseuse la rigidité maintenant impressionnante et la chaude texture, jeta un regard sur son amie qui, toujours affalée sur sa chaise, se caressait langoureusement à ce spectacle, puis se mit à sucer par petits coups le gland du Principal, puis de plus en plus franchement elle y enroula sa langue, avant d’enfourner goulûment entre ses lèvres le pénis entier. Instinctivement, Darrièges empoigna ses longues boucles noires et appuya la tête de la jeune fille contre son sexe.
Lucille s’activait maintenant avec ardeur, pompant sans relâche. Véronique, visiblement vexée de se retrouver seule, s’agenouilla à son tour et lui disputa le membre du Principal. Elles étaient comme deux chiennes devant un seul os, qu’elles agrippaient et engloutissaient tour à tour en grognant.
C’est ce moment précis que choisit Xavier pour frapper à la porte du bureau et pour y entrer sans attendre de réponse. Un instant, il resta sur le seuil, tétanisé, et le dossier qu’il tenait lui échappa des mains en répandant son contenu sur le sol. Darrièges eut un court moment d’affolement, mais les deux petites garces continuèrent comme si de rien n’était.
Le Principal sembla perdre quelques secondes le fil des événements. Quand il reprit ses esprits après quelques instants de douce torpeur, il constata que Lucille était maintenant allongée sur son bureau, son beau corps noir ondulant au milieu d’un fatras de formulaires, de chemises et de stylos, le ventre offert, la tête rejetée en arrière, tandis que lui-même, la chemise collante de sueur et le pantalon sur les chevilles, la besognait consciencieusement. Dominique s’était placée de l’autre côté du meuble, à la place qu’il occupait au début de l’entretien. Elle entreprit à son tour de gravir le bureau et s’accroupit, sans cesser de fixer le Principal dans les yeux, au-dessus du visage de Lucille. Sans hésiter une seconde, celle-ci se mit alors à laper le sexe de son amante, et eut bientôt le visage humide de ses sécrétions.
Darrièges repensa alors à Xavier. Il jeta un rapide regard par-dessus son épaule, sans cesser un seul instant ces lourds coups de boutoir. Il s’aperçut que le jeune homme avait fermé la porte derrière lui, qu’il semblait brûler d’envie de s’avancer et de participer à ce à quoi il assistait, mais qu’il se contentait, presque timidement, de se masturber, adossé contre le mur du fond comme s’il avait peur de tomber.
Lucille Dia s’agitait maintenant frénétiquement sur le bureau, renversant tout ce qui s’y trouvait encore. Véronique Marin, elle, avait fermé les yeux tandis que la langue de Lucille s’activait en elle. Elle pressait ses deux gros seins laiteux l’un contre l’autre tout en poussant des petits cris d’animal sauvage.
Darrièges, qui avait tout oublié, l’heure, le racket, l’agression de la prof d’anglais, la raison pour laquelle il avait convoqué les deux jeunes filles, et même sa femme, sentit monter la vague puissante et irrésistible de la jouissance. Ses poignets serraient les deux jambes noires et fuselées de Lucille qui tressautaient au rythme qu’il lui imposait. Il dégoulinait maintenant de sueur, et ses lunettes en étaient totalement embuées, sa vue brouillée.
Il explosa soudain, dans une apothéose de sensations. S’était retiré au dernier moment, il vit confusément les longues traînées de sperme blanchâtre aller inonder copieusement le ventre sombre de Lucille. Au même moment, les deux jeunes filles, leurs beaux traits déformés et magnifiés par le plaisir, poussaient de longs cris qui auraient menacé d’alarmer tout l’établissement s’il n’était à cette heure pratiquement vide. De l’autre côté de la pièce, Xavier jouit à son tour, avec un bruit étouffé de la gorge, sa main enserrant convulsivement son sexe, arrosant le sol et une partie du mur autour de lui.
Le quatuor reprit lentement son souffle, revenant à la réalité : c’est un jeudi soir, il est dix-huit heures, dans le bureau dévasté et souillé d’un Principal d’établissement éducatif dit ’difficile’. La chaleur était étouffante. Sentant monter une bouffée de honte en repensant à ce qu’il vient de faire, Monsieur Darrièges se met à réarranger maladroitement ses vêtements, n’osant pas lever les yeux vers les deux élèves. Derrière lui, il entend Xavier ramasser précipitamment le dossier et s’éclipser, refermant la porte en douceur.
Après avoir retrouvé un semblant de dignité, Monsieur le Principal leva la tête. et rencontra le regard malicieux et pervers des deux jeunes filles qui n’avaient pas fait un seul geste pour ramasser leurs habits éparpillés un peu partout sur le sol.
Après une oeillade rapide à sa jeune camarade, Véronique Marin dit enfin : ’ Vous voyez, Monsieur le Principal, il n’y a vraiment pas de quoi être choqué. Mais bon, c’est vrai que d’habitude, on va quand même beaucoup plus loin. Vous voulez qu’on vous montre ? ’