Anton, allongé sur le lit, résistait à l’envie de se laisser aller dans le sommeil. Il préférait tenir le plus longtemps, si possible jusqu’à atteindre une heure normale pour se coucher, afin de ne pas laisser le décalage horaire lui imposer son rythme.

L’appareil photo connecté à son ordinateur portable, il regardait d’un il distrait le diaporama qui défilait sur l’écran. Il y avait des portraits. Certains avaient été compliqués à faire. Pas techniquement, mais il avait fallu parlementer avec la personne pour qu’elle accepte enfin de se laisser photographier. Il y avait bien sûr des paysages : de régions peu fréquentées par les touristes jusqu’aux incontournables clichés des plages du Sud. Sabrina toqua à la porte.

   ─ Maman demande si tu préfères des croque-monsieur maison ou des soufflés au parmesan avec une salade carottes râpées et des tomates.

   ─ Que préférerais-tu, toi ? J’aime bien les deux.

   ─ Si tu demandes à une fille, ce sera carottes et tomates.

   ─ Ça marche !

   ─ Tu regardes tes photos ? Je peux jeter un il ?

Anton lui fit une petite place sur le bord du lit. Elle était admirative devant les clichés pris par son frère. La manière d’attraper la vie dans le regard des personnes, leurs sourires, la luxuriance de la végétation, les éclats de couleurs des étals des marchés

Plusieurs photos, avec la même jeune femme posant devant des monuments ou un panorama, se succédèrent, intriguant Sabrina. Elle questionna Anton qui sembla subitement moins à l’aise dans ses réponses.

   ─ C’est Kanyaphat, ma guide. Elle m’a fait découvrir les régions peu visitées et voir d’un autre il celles pleines de touristes.

   ─ Elle a l’air sympa, très souriante

   ─ On continuera plus tard, allons prévenir Maman pour le repas.

   ─ Ah oui, tu as raison, j’avais oublié.

Sabrina se demanda s’il y avait quelque chose entre la guide et son frère. Après tout, ils avaient passé tant de temps ensemble qu’il paraissait logique qu’ils aient pu se rapprocher. La jeune femme était mignonne et son frère majeur et vacciné, sans attaches : ils avaient bien raison de profiter, et il n’y avait rien à redire. Mais cela n’aurait pas dû le perturber plus que ça ; là, il avait directement botté en touche. Dans la piscine, il avait dit qu’une partie de lui était encore en Thaïlande. Peut-être que cette partie était Kanyaphat. En tout cas, la phrase résonnait différemment maintenant.

Alors qu’ils mangeaient, Anton écoutait les dernières nouvelles concernant la famille, se mettait à jour en quelque sorte. Un oncle lointain était décédé ; la plus jeune sur de son père attendait un enfant, mais toute la famille était inquiète : depuis plusieurs mois, le nombre de fausses-couches ne cessait d’augmenter ; le phénomène devenait préoccupant, d’autant plus que les causes en étaient totalement inconnues. Puis Rachel vint sur la question de sa grande sur qui vivait probablement ses derniers jours de couple, si ce n’était pas déjà terminé. Peut-être débarquerait-elle à l’improviste pour se ressourcer quelques jours en famille ? Puis il s’enquit des choix de sa petite sur, de ce qu’elle souhaitait faire comme études.

   ─ Mannequin ? Mais quelle idée ! Tu vas devoir manger moins qu’un moineau, avoir un rythme de vie complètement dément

   ─ Je ne dis pas top-modèle. Juste faire de la photo. En tant que modèle. Certainement qu’à force de te voir un appareil à la main, cela m’a influencée.

   ─ Tu pourrais lui faire un book ; cela lui permettrait de contacter des agences. Si ça marche, tant mieux. Sinon, elle reprend ses études. Une année de coupure l’aidera peut-être à se décider, dit Rachel en tentant de se convaincre autant qu’elle cherchait à convaincre son fils.

   ─ Quel genre de photos voudrais-tu faire ?

   ─ Je ne sais pas, c’est toi le photographe.

Anton ne s’inquiétait pas trop. Avec son physique, Sabrina pouvait faire un malheur. Surtout si elle se lançait dans la photographie érotique. Mais comment le prendrait-elle ? Et sa mère avait certainement son avis sur la question. Il resta perplexe un instant. Pourquoi fallait-il que, dès qu’il se mettait à penser à sa sur, cela devienne très vite torride ? Non, il ferait des portraits classiques, glamour, des photos un peu mode. Il y réfléchirait plus tranquillement, plus sereinement. Une bonne nuit de sommeil et tout deviendrait plus clair.

Anton se leva, débarrassa la table avec sa sur. Alors qu’ils déposaient les couverts dans l’évier, elle l’attrapa par la taille et colla sa tête contre son épaule, enfin le haut de son bras. Il se figea dès qu’il se fut libéré les mains. Pas par crainte de ce contact, mais pour le savourer. Il y avait bien longtemps qu’elle n’avait pas eu ce geste de petite sur.

   ─ Je suis contente que tu sois enfin là. Tu m’as manqué, frangin !

   ─ Je sais. Depuis la mort de papa, je suis devenu ton repère masculin mais je ne suis pas aussi présent que tu l’aurais souhaité.

   ─ Il me manque lui aussi.

   ─ Il nous manque à tous.

Il regarda autour, chercha sa mère du regard. Elle était sortie de la cuisine. Il y avait pas mal de linge à laver : elle était probablement allée dans la buanderie. Il attendit quelques secondes.

    ─ Et maman ? A-t-elle trouvé quelqu’un ?

    ─ Il faudrait qu’elle cherche ; tu la connais aussi bien que moi. Elle a bien quelques passades de temps à autre, mais jamais rien de sérieux. C’est sa manière d’être fidèle à papa.

   ─ Oui, rien n’a changé. D’ailleurs je ne m’attendais pas réellement à du changement de ce côté-là.

Quelques secondes de silence. Ils ne bougèrent pas d’un pouce, savourant l’instant. Il sentit le parfum de la peau de Sabrina que tentait d’occulter l’odeur de chlore de la piscine. Il lui sembla qu’elle se blottissait encore plus contre son épaule. Il devait faire attention : l’érection le guettait, comme tapie dans l’ombre, prête à lui sauter dessus.

   ─ Je vais prendre une douche et j’irai rejoindre les bras de Morphée. Je te souhaite une bonne nuit, petite sur.

   ─ Je ne traînerai pas longtemps non plus. J’ai envie de profiter de toute ma journée avec toi demain. Ça te dirait une balade à vélo ?

   ─ C’est un programme qui me convient.

Il embrassa sa sur sur les joues et fila dans la salle de bain. Sabrina mit de l’eau dans la bouilloire et appuya sur le bouton. Elle prit un sachet de thé et un mug dans le placard.

   ─ Frangine ! J’ai oublié de prendre mon gel douche et ma serviette. Tu peux aller me les chercher dans ma chambre ?

   ─ OK, j’y vais.

Elle grimpa l’escalier quatre à quatre. Le sac de son frère était posé au pied du lit ; elle le fouilla et trouva rapidement ce qu’elle cherchait. Sabrina passa machinalement son regard sur le lit, et notamment l’ordinateur. Elle fut tentée de jeter un il sur les photos. Non, elle ne devait pas faire cela. Elle continua et apporta les affaires de son frère dans la salle d’eau. Arrivée à ébullition, la bouilloire s’était arrêtée. Sabrina versa l’eau dans la tasse. Pendant que le sachet infusait, elle songeait à l’ordinateur sur le lit de son frère. Elle ne put résister et remonta plus discrètement. Elle effleura l’écran. Anton avait juste réduit la fenêtre du diaporama. Elle cliqua sur les photos plutôt que d’attendre le défilement automatique. Elle n’eut pas longtemps à attendre pour vérifier sa théorie.

Son frère avait toute une série de clichés concernant sa guide. Elle avait un regard beaucoup plus enjôleur. Plus les vues défilaient, plus le cadrage se resserrait autour de la belle Asiatique. Puis Anton, tenant son appareil à bout de bras, avait pris des photos où il tenait la jeune Thaï contre lui. Elle semblait être bien plus qu’une simple guide. La suivante les montrait tous les deux s’embrassant, et ce n’était pas le baiser d’un photographe remerciant sa guide. Plus aucun doute, Anton avait flirté avec Kanyaphat. Étonnant ? Elle avait déjà retenu son prénom. Il avait fait plus que flirter, visiblement. Il avait photographié la jeune femme dans des poses érotiques. De plus en plus érotiques. Sabrina était heureuse que son frère ait une si belle petite amie. Elle se dit qu’elle allait certainement trop vite en besogne ; la jeune femme n’était peut-être qu’une aventure passagère pendant qu’il séjournait dans son pays. Mais n’avait-il pas dit qu’une partie de lui était restée là-bas ?

Elle continua de faire défiler quelques photos, mais elle devrait descendre boire son thé et faire comme si de rien était. Elle en avait déjà assez vu. Encore quelques-unes. Après tout, c’était une très jolie femme et il n’y avait aucune honte à admirer un beau corps féminin, si bien photographié. Les poses étaient de plus en plus évocatrices. Elle avait de jolis petits seins bien ronds. Elle ressemblait à un petit animal fragile qu’Anton avait certainement ressenti un besoin impérieux de protéger, fort de sa carrure de jeune homme bien bâti. Et elle, se sentant ainsi en toute sécurité, s’était abandonnée à lui, avait joué le jeu, se dévoilant au fur et à mesure que la séance se déroulait. Les photos devenaient de plus en plus intimes. Prise dans la rapidité de son geste, Sabrina fit passer encore deux clichés.

Stupéfaction ! Elle passa une main devant sa bouche comme pour masquer qu’elle l’avait grande ouverte. Elle n’était pas réellement choquée, juste étonnée. Très étonnée. La jeune femme était totalement alanguie sur le lit, entièrement nue. Un drap s’enroulait autour d’une jambe, passait sous son bassin, s’enroulait à nouveau autour de son torse. Comme une liane autour d’un arbre, comme une guirlande autour d’un sapin. Le drap ne masquait rien, ce n’était pas sa fonction ; il magnifiait le corps en servant de cadre à ses menus seins bien ronds et fermes. De la même manière, il dévoilait une petite verge qui n’avait rien d’un organe masculin. Ce garçon, cet ancien garçon non, cette fille était vraiment magnifique.

Sabrina fit défiler les photos en arrière et revenir où le diaporama en était resté pour ne pas éveiller les soupçons de son frère, ne pas révéler qu’elle l’avait trahi en fouillant dans son ordinateur. Elle rabattit l’écran et redescendit. Le thé allait être sacrément dosé ! Elle y versa un nuage de lait, s’assit, ferma les yeux et but une première goulée.

Bizarrement, elle avait chaud dans le ventre, mais cela ne venait pas du thé. Quelque chose la démangeait, et c’était bien plus bas que son estomac. Les photos l’avaient sérieusement émoustillée. Par leur contenu d’abord, mais aussi par le fait de découvrir que son frère pouvait prendre de magnifiques images érotiques.

Si elle restait dans la cuisine, elle allait croiser son frère qui se dirigerait vers sa chambre. Elle n’en avait pas envie. Non pas qu’elle fût gênée du fait que son frère était un merveilleux photographe d’uvres érotiques, mais elle avait besoin de digérer la découverte, de laisser passer ces sensations dans son bas-ventre.

Elle prit sa tasse à moitié pleine et se dirigea vers sa chambre. Rachel était dans le salon au rez-de-chaussée ; elles se souhaitèrent une bonne nuit, mais Sabrina savait qu’elle ne pourrait pas s’endormir aussitôt.

Elle enfila un vieux débardeur que son frère ne portait plus depuis des années. La différence de carrure le rendait très confortable, elle nageait dedans ; et puis lorsqu’Anton s’absentait longtemps, c’était un moyen de garder le contact. L’échancrure était si large qu’on apercevait facilement la naissance du galbe du sein. Sa mère râlait régulièrement lorsque qu’elle traînait ainsi vêtue dans la maison. Pas que sa mère fût prude, mais parce qu’elle trouvait cette rondeur à peine cachée très excitante et que son veuvage ne lui laissait pas toujours la possibilité d’assouvir ses envies. Mais après tout, elle n’avait qu’à s’en prendre à elle-même : c’était bien Rachel qui ne voulait pas se remettre avec quelqu’un.

Sabrina était assise sur son lit, la tête posée sur ses genoux, le regard perdu dans le vague. Elle songeait bien évidemment aux photos de son frère et s’imaginait posant pour lui lors de séances similaires. Elle reposa la tasse de thé sur la table de chevet puis s’allongea sur le lit, les jambes écartées, les genoux relevés. Elle ferma les yeux, glissa une main entre ses cuisses. Un doigt courait le long de cette fente, remontant le sillon magnifique, et la pulpe termina sur ce petit relief qui déjà durcissait. La pression encore légère et le frottement du majeur presque imperceptible enclenchait déjà une spirale de plaisir que Sabrina devinait difficilement contrôlable. Elle ressentit comme un souffle sur sa vulve. Elle ouvrit les yeux. Non, bien sûr, il n’y avait personne : juste un tour que lui jouait son esprit. Anton ne pouvait être ici.

Voilà qu’elle fantasmait sur son grand frère. Elle se doutait bien que l’idée avait quelque chose de malsain, et pourtant Était-ce la découverte de sa relation qui attisait cette envie ? Entendait-elle, inconsciemment, remettre Anton sur le droit chemin ? Elle n’était pas le moins du monde choquée que son frère batifole avec une belle ladyboy thaï ; il n’y avait donc pas de bon ou de mauvais chemin. Sauf sauf à considérer qu’il était le seul à même de transmettre le nom de famille. Certes, elle ou sa sur pouvait rechercher un géniteur qu’elle renverrait une fois sa mission réussie, élever seule l’enfant qui ainsi garderait le nom de sa mère. Mais il était tout de même plus simple que ce soit Anton qui perpétue la lignée des Lynné.

Elle évacua ces pensées de son esprit et se concentra sur son plaisir. Le majeur se faufila avec une lenteur volontaire dans ce coin de paradis tandis que l’éminence thénar venait cajoler son grain de café rose. Elle se rappellerait toujours du nom de cette partie de la main : elle avait fait une chute à vélo et s’était ouvert cette partie de la paume située à la base du pouce. A cette époque-là elle lisait « Les misérables », et elle s’était interrogée sur un éventuel lien entre la famille Thénardier et cette éminence de la paume. Elle fut presque déçue quelques années plus tard, lorsqu’elle apprit qu’il n’y en avait aucun, mais elle avait fait une découverte qui la rendait toujours joyeuse quand elle y pensait.

Alors qu’elle préparait son rôle de diseuse de bonne aventure dans le spectacle que la troupe de théâtre de l’école jouait en fin d’année, Sabrina avait fait des recherches sur la chiromancie. Elle était comme ça : elle ne faisait pas de brillantes études mais elle était curieuse de tout, et donc, comme elle devrait lire les lignes de la main, elle s’intéressa à cet « art ». Non pas pour prétendre être capable de divination, mais pour être simplement crédible. Sabrina acheta un livre afin de connaître le vocabulaire, les mots employés, le nom des différentes lignes, mais aussi de ces zones appelées « monts ». Ainsi, elle apprit que cette fameuse partie de la main qu’elle avait cru bon de marquer d’une cicatrice, d’une ligne jusque-là inexistante, se nommait « mont de Vénus ». Depuis, elle souriait à chaque fois qu’elle se caressait ainsi, d’un geste semblable à celui effectué pour étaler la pâte lorsqu’elle cuisinait une tarte aux pommes, comme pour allonger son clitoris. Aurait-elle finalement souhaité avoir un pénis ? Jamais. C’était les photos de la guide qui lui mettaient de drôles d’idées en tête. Non, c’était cette superposition de monts de Vénus qui l’amusait.

L’index rejoignit le majeur ; ses sécrétions semblaient être de la lave en fusion. Elle venait à peine de commencer et elle sentait déjà arriver son orgasme. Jamais elle n’avait été aussi rapide, et pourtant elle ne s’était pas plus touchée que d’habitude. Décidément, Anton lui jouait des tours et, involontairement, exacerbait son excitation.

Sabrina ressentit comme des petites décharges électriques dans son ventre, puis plusieurs vagues de plaisir se suivirent. La première fut brève et de faible intensité, mais les ondes suivantes allèrent crescendo. Son corps se crispa. Elle avait encore envie. Elle se tourna sur le ventre ; c’était un bon moyen d’étouffer ses gémissements dans le coussin. Son appétit gargantuesque prévoyait de futurs décibels. Elle glissa deux doigts en elle, toujours le majeur et l’index. Ils parcouraient la paroi antérieure du vagin tandis qu’à l’extérieur son pouce fricotait avec le clitoris.

Elle cria son plaisir dans le coussin et les spasmes parcoururent son corps comme une onde de choc après une explosion. Puis tous ses muscles se relâchèrent ; elle resta ainsi affalée sur son lit, planant comme une nappe de brouillard un soir d’été après une ondée apaisante. Dans cette torpeur, elle se voyait étreindre cette belle Thaï qui avait accompagné son frère. Et Anton, bien sûr, était là.

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