9.

— je vous ai dit que trois semaines après la rentrée, une nouvelle élève est venue sinstaller dans ma chambre. Abbygail. Mon âge, rousse aux cheveux longs, un peu ronde, mais surtout une poitrine opulente. Trop même car elle fait un bonnet G !

Donc Abby sest installée dans ma chambre. Si moi, jétais en droit, elle était inscrite en école de commerce. La cohabitation se passait pour le mieux. Malgré ses formes généreuses, Abby savait se faire toutes petite. De toute façon, elle passait une bonne partie de son temps à la bibliothèque, me laissant la chambre pour que je travaille en paix.

Puis un soir, on sest retrouvée toutes les deux. Et elle mexpliqua pourquoi elle était arrivée si tard.

— Elé, je dois tavouer une chose. Si je suis arrivée en retard, cest parce que jétais en dépression.

— oh, cest triste.

— rupture amoureuse.

— encore plus triste. Mais tu trouveras très vite quelquun dautre bien mieux que ton ex. comme on dit en France : un de perdu, dix de retrouvés !

Elle me fit un sourire triste, comme quoi la blessure nétait pas complètement refermée.

— si tu as besoin dun câlin, je suis là, dis-je. Je peux poser une question indiscrète ?

— oui, tu peux.

— pourquoi ton copain ta quitté ?

— elle est partie pour une autre.

— elle ?

— oui. Je suis lesbienne. Ça ne te gêne pas ?

— non, pas le moins du monde. Jai une famille très ouverte desprit. Et jai été éduquée dans ce sens.

— jen suis heureuse.

On en resta là. Abby se faisait toujours aussi discrète. Un soir, elle me proposa de sortir dans un bar lesbien. Jacceptai, plus pour lui faire plaisir que réellement aller gougnotter des filles. Cest pas que jaime pas, mais une fois de temps en temps, cest amplement suffisant. On entra dans le bar bras dessus, bras dessous. Mais Abby nalla pas plus loin dans le tactile. On a bu un peu, dansé beaucoup, parlé aussi avec dautres filles, curieuse de discuter avec une française.

Puis on est rentrée.

— merci davoir passé cette soirée avec moi, me dit Abbygail.

— de rien. Ça ma fait du bien aussi.

Et là elle sapprocha et posa ses lèvres sur les miennes.

— merci encore.

Je la regardai surprise. Je ne mattendais pas du tout à cette réaction. Mais en la regardant, je vis une lueur étrange dans ses yeux. Une lueur de bonheur. Je compris de suite quelle avait déjà remplacé son ex.

— je ne suis pas lesbienne, dis-je pour calmer le jeu avant que ça naille trop loin et lui éviter une nouvelle déception.

— je sais, me dit-elle. Je sais.

Ça en resta là. On reprit nos habitudes. Je ne la voyais pas beaucoup. Tout juste si on se croisait le matin.

Un soir, je la trouvais en pleur dans son lit.

— quest-ce quil tarrive ? demandé-je.

Elle me tendit son téléphone. Une photo et un texte pas vraiment gentil. Insultant même.

— ton ex ?

Elle me fit oui de la tête.

Non seulement elle lavait plaquée pour une autre, mais en plus elle la narguait avec une violence inouïe. Je la pris dans mes bras pour la consoler, en espérant quelle ne sombre pas à nouveau dans la dépression.

— je peux dormir avec toi ce soir ? me demanda-t-elle. Jai besoin de contact.

— si tu veux.

Elle sallongea sur le côté et je vins me coller dans son dos. Cétait la première fois que je passai la nuit avec une fille. Et là il sest passé quelque chose. Je ne sais pas si cétait le manque de relation ou quoi, mais son contact ma fait du bien à moi aussi. Et jai presque été déçue quand elle sest levée.

— merci davoir été là, me dit-elle avant de partir à son cours.

Le soir, on dormit chacune dans notre lit. Mais je ressentais comme un manque. Le contact avec son corps, sa chaleur.

Le soir suivant, ce manque devint plus fort. Abby ne montra pas de signe dun désir de rapprochement. Elle avait oublié le texto de son ex.

Cela dura une semaine. La sensation de manque finit par sestomper. Pour revenir encore plus forte ensuite. Javais beau me raisonner mais cette fille mattirait de plus en plus. Dautant plus, elle commençait à se maquiller, chose quelle ne faisait pas lorsquelle était arrivée. Elle prenait plus soin delle, de ses tenues. Et devenait au fil des jours, de plus en plus séduisante. Je me sentis obligée den faire autant, moi qui me contentais que dun peu de mascara et de gloss.

— tu es très jolie, me dit-elle un matin.

— toi aussi. Je suis contente que tu reprennes goût à la vie. Tu as rencontré quelquun ?

— non. Mais jespère que ça viendrai très vite. Et toi ? Un amoureux ?

— non plus. Pas le temps !

Elle rit et quitta la chambre. Son rire cristallin me fit frissonner.

Le lendemain, Abby prenait sa douche et la porte était mal fermée. Je jetais un coup dil et la vit, totalement nue. Rondes, mais pas grosse. Des formes pulpeuses. Elle se retourna et je découvrais sa poitrine énorme, des seins qui tombaient sur son ventre. Elle maperçut, cacha ses seins avec sa serviette et claqua la porte.

Elle quitta la chambre sans un mot. Sans le savoir, je lavais blessée car je compris quelle avait honte de sa poitrine trop volumineuse et tombante. Il fallait absolument que je me rachète.

Lorsquelle revint le soir, tard, je lattendais, assise sur mon lit. En me voyant, elle détourna son regard et fila dans la salle de bains pour se mettre en pyjama.

Je la suivis mais elle me claqua la porte au nez. Pas grave, jattendrai quelle sorte. Ce quelle fit dix minutes plus tard après sêtre douchée.

Elle voulut refermer la porte mais je la bloquai avec mon pied, poussai la porte et entrai à mon tour.

— je suis désolée pour ce matin, dis-je. Je ne voulais pas te blesser.

Je luis tendis une petite orchidée blanche.

— pour me faire pardonner.

— jaime pas quon voit mes seins. Ils sont gros, moches.

Je la pris dans mes bras.

— cest ton corps. Tu ne dois pas en avoir honte. Jamais, tu entends ? Sil y en a qui ne les aime pas, cest leur problème, pas le tien. Tu as dois déjà en avoir assez à la fin de la journée sans en plus tinquiété du regard des autres. Et puis il y a moyen de faire une réduction.

— oui mais cest cher. Cétait ça ou la fac.

— tu as fait le bon choix, crois-moi.

— tu les trouves jolis mes seins ?

— bien sûr quils ont beaux ! Et tu devrais les mettre encore plus en valeur. Un soutien-gorge approprié et un joli décolleté, crois-moi, tous les garçons vont tomber à tes pieds.

— je préférerais une fille.

— ah oui. Désolée.

On éclata de rire.

— tu veux dormir avec moi ? proposé-je.

Son regard sillumina.

— ok alors, dis-je.

— merci pour lorchidée, cest très gentil. En fait, cest la première fois quon moffre des fleurs.

On se coucha ensemble, dans la même position que la fois précédente. Je retrouvai son contact, sa chaleur, son parfum.

Je passai mon bras sous sa poitrine. Elle sen empara aussitôt et déposa un bisou sur ma main.

Je me réveillai, seule. Un mot sur la table de nuit.

« merci pour cette nuit. Pour la première fois depuis longtemps, jai dormi comme un bébé. XXX. Abby »

Moi aussi, javais dormi comme un bébé.

Du regard, je fis le tour de la chambre. Puis je bondis du lit. Je déplaçai les meubles et collai nos deux lits lun contre lautre.

Je ne vous dis pas la tête dAbby quand elle rentra le soir. Elle posa ses affaires, courut vers moi, me prit dans ses bras et me roula une pelle denfer. Elle membrassa comme personne ne mavait jamais embrassé. Une frénésie sempara de nous. Toujours bouche contre bouche, on se déshabilla, on roula sur le lit et nous fîmes lamour plusieurs fois.

— je taime, me dit-elle après nos ébats. Je taime depuis que je tai vu le premier jour. Je savais quil ne se passerait rien entre nous et je métais faite à lidée.

— moi non, jétais sure quil ne se passerait rien entre nous. Mais il y a quelque chose en toi qui ma fait changer didée.

— jen suis heureuse.

Cela fait maintenant un petit mois quon couche ensemble. Et tout le monde est au courant.

— quand est-ce que tu nous la présente ? demanda Isabelle.

— on a prévu une cam cette nuit.

— ok alors.

Eléonore présenta sa mère et son travesti de père à Abby. La conversation dura une bonne heure et lengagement fut pris pour quAbby vienne passer quelques jours pendant les vacances de Pâques.

De mon côté, je discutai avec Jeff, qui tenta de mexpliquer ses études. Il comprit rapidement que cétait peine perdue. Mais il nen fut pas vexé pour autant. Dans la soirée, je racontais ma vie aux jumeaux, mon arrivée ici et létrange proposition que leur mère.

— cest une chance que tu aies vu lannonce. Sans quoi on serai passé à coté de toi. Et cela aurait été dommage, me dit Jeff. Tu sais, je suis plus attiré par les mâles bien virils, avec des muscles partout. Mais je ferai une exception pour toi, ajouta-t-il en me caressant le visage.

— moi aussi, répliqua Eléonore, puisque tu es payée pour ça.

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