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Maraudeuse – Chapitre 3




3 Un mort bien vivant

Destiné avant tout à préserver les Nymphes d’éventuelles agressions, le secret sur l’emplacement de Dyonisa nourrissait beaucoup d’histoires, le temps en avait fait des légendes. Certains disaient la planète riche en pierres précieuses, d’autres prétendaient que les guerrières tiraient leur immortalité de son atmosphère ou qu’une malédiction les poussait à sacrifier les enfants mâles.

La sagesse des Nymphes avait inspiré des civilisations. Les Amazones sur Terre, les Élamines sur Tsula, les Walkyries sur Vidaria, les Hétaïres sur Coralia et bien d’autres s’étaient distinguées à la défense des opprimées dans de nombreuses batailles à travers les galaxies. Malheureusement, l’indulgence de quelques-unes envers les mâles avait été une erreur fatale.

À l’époque où les dinosaures n’avaient pas encore peuplé la Terre, quand la vie sur Aural en était à l’état embryonnaire, des femmes avaient pris le pouvoir sur une planète isolée tournant autour de son étoile, résolues à ne plus supporter les mauvais traitements infligés par les hommes. Des savantes auraient pu apporter les modifications génétiques nécessaires à l’évolution ; elles s’y refusèrent, conscientes qu’aucune autorité morale ne leur accordait ce droit.

La Nature, une force implacable commune à tous les mondes sans exception, se mit à l’ouvrage ; la mutation du métabolisme prit du temps, celle de l’esprit davantage encore, jusqu’à faire des Nymphes ce qu’elles étaient désormais. Sur Terre, des théologiens de certaines confessions les auraient imaginées touchées par la grâce, d’autres les auraient vouées à la damnation. Pour Kira, elles incarnaient la perfection.

Tous les êtres dits intelligents sont dotés de capacités psychiques. Il faut d’abord en prendre conscience, cela se fait par l’éducation, puis apprendre à les utiliser, c’est là que les Nymphes interviennent. L’apprentissage peut durer quelques semaines, des mois ou des années. Un enfant comprend vite que le contenu d’un verre d’eau étanche sa soif, il lui faudra du temps pour apprendre à boire proprement.

Installée sur un banc près de Morgania, la jeune femme savourait la douce quiétude du soir.

J’ai déjà utilisé l’induction psychique sans le vouloir, reconnut-elle dans un souffle, excepté une fois où c’était volontaire.

La préceptrice ne chercha pas à connaître les secrets de son élève, les révélations se feraient ou pas, peu importait. Depuis cinq jours, ses progrès en matière de manipulation mentale ne cessaient de la surprendre. L’Auralienne aurait pris conscience de ce pouvoir un jour ou l’autre, elle serait parvenue seule à en maîtriser les mystères.

Il faut songer à te reposer, maintenant, tu passeras les épreuves du Grand Savoir demain. Allez, au lit !

Kira se suspendit au bras de Morgania, souriante, la pierre de tranquillité préservait son esprit d’un abus de réflexions.

Les allocutions du prince sur les écrans géants de la cité se voulaient de plus en plus virulentes. Ces discours suscitaient de nombreuses réactions qui dégénéraient parfois en disputes ; pourtant, entre deux débats calmes ou animés, les habitants vaquaient à leurs occupations. La présence d’étrangers à Ashora ne soulevait aucune polémique malgré les rumeurs de terrorisme sur les planètes voisines. Seule la disparition inexpliquée de Kira entretenait une angoisse collective.

Le tavernier compta la monnaie puis, satisfait, déposa les petits verres sur la table ; le commandant allait bander mou avec tout ce mariach ingurgité, la rouquine tenait mieux l’alcool de grain que l’officier. Ces deux-là vidaient une bouteille chaque soir, assis à la même table depuis une petite semaine, et la belle semblait sur le point de succomber au vieux guerrier versé à la garde du palais en raison de son inaptitude à servir l’armée sur Aural 2. La psychologie féminine restait un mystère aux yeux du tenancier.

Ça devait finir comme ça, grommela le commandant désabusé, la consanguinité entraîne des conséquences. Enfin ! Le problème est réglé avec la disparition de sa sur, le prince ne pourra pas suivre le père dans sa perversion. Ce vaniteux s’est fait prendre à son propre piège.

Sarah accepta la main rugueuse sur son avant-bras. L’officier se fendit d’un sourire énamouré, ravi de se donner de l’importance. La jeune femme balaya une mèche rousse de son front d’un geste aérien.

Votre savoir m’impressionne, gloussa-t-elle sous le charme, c’est la marque d’une grande intelligence. Parlez encore, ça me donne des frissons.

Attentive à ne pas se montrer trop curieuse par des questions directes, la Terrienne se contentait d’orienter les débats.

Le pouvoir de l’esprit est transmis à la famille royale de génération en génération, les reines sont choisies parmi les gens du peuple pour en limiter les excès. Elles donnent toujours naissance à un héritier mâle puis à une princesse dont la charge est purement honorifique. Ce que les gens ignorent, souffla le commandant fier de détenir un secret d’État, c’est que le roi a couché avec sa sur, le vieux fou pensait accroître les pouvoirs de son fils. Malheureusement pour lui, la fille est née en premier, on n’avait jamais vu ça à Ashora, et comme la loi n’avait pas prévu pareille éventualité, la princesse aurait dû hériter de la couronne.

L’officier reprit son souffle dans une rasade de mariach.

Où est-elle alors ? demanda Sarah, heureuse de la savoir à l’abri chez les Nymphes.

Certainement dans la forêt maudite avec sa mère Kalys, si celle-ci n’est pas encore morte de chagrin. La pauvre a sombré dans la folie après le deuxième accouchement, alors le roi l’a bannie.

Perturbée, la jeune femme éclusa son verre puis commanda une nouvelle tournée. Le temps de permettre au tavernier de s’exécuter, elle avait retrouvé son calme.

Personne ne l’a revue ?

Le vieux saligaud a pris soin de dresser une barrière mentale autour de la forêt, la légende du Svorah a fait le reste. Dans son cachot, il doit se mordre les doigts d’avoir accordé autant de pouvoir à son fils. Une vraie teigne celui-là ! La princesse était bonne avec tout le monde au moins, même moi je la regrette. Son frère est le mal incarné, il va attaquer la planète Karal dans une semaine. Ils sont pourtant sympas, les Karaliens. Je suis consigné au palais, tant mieux, ils ne se laisseront pas faire.

La présence de la reine dans l’enceinte de l’école monopolisait les conversations au petit-déjeuner. Kira tendit le pot de miel à Médosiane, une jeune Saphrosienne trouvée dans une rue sale du comptoir de Médos, d’où son nom, attachée avec d’autres à l’étal d’un marchand d’esclaves. Les nymphes les avaient toutes libérées puis déposées sur une planète accueillante. Convaincues des pouvoirs psychiques de la Saphrosienne, elles l’avaient ramenée à Opaline.

C’est le grand jour, tu vas passer les épreuves du Grand Savoir. D’après Morgania, jamais une disciple n’a eu cet honneur après trois semaines de présence. Moi, je suis là depuis six mois.

Kira s’imprégna des grands yeux noirs sous le crâne chauve, une caractéristique de l’espèce Saphrosienne dont seuls les mâles arboraient des cheveux sombres. La jeune fille sentit le sourire de Kira pénétrer sa chair, semblable à un onguent pour apaiser la douleur ; alors, comme aucun mal ne la contrariait, elle se sentit submergée de bonheur.

Ton tour viendra, sois-en persuadée.

Médosiane la remercia d’un baiser sur la joue sous le regard intéressé de Morgania. Le pouvoir de l’Auralienne dépassait de loin ce qui lui avait été donné de voir depuis sa prise de fonction à l’école trois cents ans plus tôt. La sensation d’une présence ajoutée au silence soudain la tira de sa réflexion.

Je vous en prie, mesdemoiselles, sourit Callimaque aux élèves curieuses, continuez. Notre novice se sent prête ? demanda-t-elle sur le ton de la confidence en prenant place à la table des préceptrices.

L’apparente tranquillité d’esprit de Kira le laissait augurer, la réussite dépendrait de sa capacité à contenir ses émotions dans les différentes épreuves. Les leçons dispensées au jardin de la vérité servaient à révéler leur potentiel aux pupilles, à les mettre dans les meilleures conditions pour permettre à chacune de trouver sa voie propre. Les Nymphes ne pouvaient en aucun cas faire le chemin à leur place.

Nous avons hâté un processus inéluctable, soupira Morgania en confiance, la jeune Auralienne a éprouvé son esprit avant d’arriver ici. Elle gagne en sérénité chaque jour, comme si la prescience d’un destin hors du commun l’habitait.

Tant mieux, gronda Callimaque rassurée, Kira est une princesse amenée à régner. La patrouille va bientôt rentrer d’Ashora, nous en saurons davantage sur les capacités de l’usurpateur à entraîner le peuple dans sa guerre de conquête.

Les préceptrices observèrent un silence préoccupé ; une espérance de vie d’un millier d’années n’empêchait pas les Nymphes d’être mortelles.

La main sur le carian, un arbre commun à de nombreuses galaxies appelé séquoia sur Terre, Carabelle sentait la sève circuler à travers l’écorce crevassée. Une vue parfaite lui permettait de distinguer les cônes suspendus au feuillage vert à une douzaine de mètres de hauteur.

Kiros ne sait pas utiliser ses pouvoirs, sourit-elle désabusée, une véritable barrière psychique empêcherait la végétation de prospérer.

C’est l’uvre du vieux roi, rectifia Héliothaïs songeuse. Le fils a hérité du père et de la mère, on ne doit pas le sous-estimer.

Les révélations de l’officier avaient poussé la patrouille dans la forêt maudite, lancée sur les traces d’une femme séquestrée depuis des années, coupée du monde, y compris d’une faune invisible.

De quoi devenir folle si ce n’était déjà le cas, grommela Sentence dans une litanie d’injures, on est encore loin ?

En d’autres temps, le langage cru de son amie aurait provoqué une réaction de Sarah. Après des heures de progression à l’aveugle, un point lumineux se matérialisait enfin à l’écran du digitaliseur. Elle imposa par signes le silence à ses compagnes en pointant du doigt le fond de la vallée en pente douce à deux cents pas, une forme se distinguait par instant entre deux troncs derrière un épais taillis.

Attentives à ne pas trahir leur présence par un mouvement brusque, les patrouilleuses se déployèrent en éventail ; la malheureuse serait certainement tentée de fuir après une si longue solitude forcée. Elle leur apparut bientôt accroupie devant un ruisseau, nue, les mains dans l’eau à nettoyer une poignée de baies. D’apparence convenablement nourrie, rien ne laissait supposer d’éventuels problèmes de santé. Propre bien qu’en lambeaux, une tunique séchait sur une branche. Saramiaë se montra d’une extrême douceur.

Kalys ?

L’interpellée se retourna, la présence de cinq jeunes femmes en combinaison de vol interstellaire ne semblait pas l’émouvoir, elle se releva souriante. Malgré l’étrange lueur dans le regard sombre, les longs cheveux châtains informes, Sarah reconnut aussitôt la mère de Kira à la finesse des traits, aux adorables fossettes qui mettaient la bouche aux lèvres un peu fines entre parenthèses.

Désolée de vous recevoir dans cet état, ma robe est encore humide. Vous avez fait bon voyage ? Je devrais cueillir d’autres baies ou nous allons en manquer. Venez dans mes appartements, une collation vous sera servie.

Les patrouilleuses se concertèrent en silence, aucune des hypothèses échafaudées ne se révélait exacte. Héliothaïs prit Kalys par la main.

Merci, dit-elle d’une voix posée, c’est un honneur.

Je t’en prie, mon enfant, gloussa l’infortunée en baisant les doigts de la Nymphe, le plaisir est pour moi.

La cahute dissimulée derrière un épais front végétal à proximité du ruisseau interpella les visiteuses. Le toit de feuilles soutenu par une solide armature de branchages colmaté avec de la mousse semblait étanche, elles passèrent le rideau d’épaisses lianes en guise de porte, un feu crépitait au fond d’un trou creusé au centre de l’abri. Kalys tendit une calebasse à Sarah qui inspecta l’étrange pastèque à l’écorce solide comme du bois ; sur Terre aussi certaines cucurbitacées avaient servi un temps de récipients.

Fais attention, ce vin de baie a macéré longtemps.

Immergée jusqu’au coup dans l’eau du bassin depuis plus d’une heure, les traits de Kira conservaient une étonnante décontraction. En appui sur le pied droit, le gauche posé sur le genou opposé, les bras écartés à l’horizontale, la position ne semblait pas la gêner davantage que le froid. Les préceptrices suivaient mentalement son long périple sur Ashora.

Les épreuves s’enchaînaient depuis le début de la matinée, dans des conditions plus difficiles parfois que l’exercice lui-même. Les préceptrices avaient abreuvé son esprit d’informations vraies ou fausses, d’images réelles ou trafiquées sans parvenir à trouver la faille, à la déstabiliser. Puis Kira avait exercé ses talents en plein effort physique pour éprouver sa capacité d’endurance. On l’avait ensuite soumise à une pression mentale qui aurait plongé une jeune femme ordinaire au seuil de la folie, sans effet.

Par induction psychique, elle ordonna au capitaine des gardes de la faire entrer sur le grand astroport commercial à la porte sud de la cité. Là, deux Melenites déchargeaient de lourds containers. Ailleurs, un équipage de la planète Langle se disputait à propos de leur prochaine destination. Kira finit par approcher le cargo de la patrouille en attente, son emplacement au bord du tarmac annonçait un départ prochain.

Face à la maîtrise des émotions de la novice, Morgania projeta l’image de Sarah dans son esprit, en vain. Elle lui fit voir la Terrienne morte sur la pelouse du palais, le corps ensanglanté entouré de sentinelles joyeuses. La jeune femme balaya l’information pour se concentrer à la tâche assignée ; elle ordonna au capitaine de tancer vertement un de ses hommes.

Je t’ai dit de rester sur le tarmac des arrivées ! hurla l’officier au garde attentif aux deux vaisseaux sur le départ. Ceux-là ont déjà été vérifiés. Encore une insubordination de ce genre et je te colle au trou !

L’homme se sauva au pas de course sous le regard limpide de Kira, puis le capitaine retrouva sa place à l’entrée de l’astroport. La libération de son esprit ne l’empêcherait pas de suivre les injonctions induites par la télépathe, à savoir laisser passer les femmes sans vérifier leurs identités.

Je pense que cela suffit, annonça Callimaque d’une voix égale, nous pouvons être satisfaites de notre pupille.

À peine sortie de l’eau, Kira fut libérée de la tunique de coton trempée qui moulait ses formes. Les préceptrices s’empressèrent de la sécher puis de la couvrir d’une étoffe de soie blanche brodée d’or, réservée à la cérémonie de l’au revoir. La novice s’effaçait enfin devant la nouvelle adepte du Grand Savoir.

Viens m’embrasser, chère enfant, lui sourit la reine les bras tendus.

Vêtue d’une simple robe de chanvre achetée à une pauvre fermière en périphérie de la cité, Kalys souriait à la cantonade ; désagréable à la peau, le vêtement d’indigente la comblait après des années de dénuement. Les vieilles chaussures de cuir un peu grandes couvraient ses pieds dont la plante durcie aux terrains ingrats de la forêt aurait supporté n’importe quel traitement.

Sentence lui marmonnait des instructions sous couvert de l’initier au drôle de jeu de piste improvisé. À les voir bras dessus bras dessous, les observateurs imaginaient une grande complicité amicale entre les deux femmes. Le contact physique d’une Nymphe rendait sa présence indétectable par un pouvoir psychique, et bien peu pouvaient encore reconnaître la sur du vieux roi.

Le garde à l’entrée de l’astroport consulta la fiche de l’équipage constitué à l’arrivée de cinq femmes ; la présence d’une sixième éveillait sa curiosité. Le capitaine ordonna à la sentinelle de les laisser passer.

La position debout devenait inconfortable, surtout derrière un fauteuil au moelleux incomparable, encore un privilège réservé aux grands chefs ; toutefois, le commandant n’avait pas le choix.

Vous êtes encore rentré au quartier complètement ivre ! tonna le général en charge de la sécurité du palais. Un tel comportement est inadmissible dans l’armée d’Ashora, vous êtes aux arrêts en attendant la décision de l’état-major, disparaissez.

Le commandant salua son supérieur puis le prince avant de filer d’un pas incertain. La porte se referma en silence.

Il n’y a plus rien de bon à en tirer depuis son éviction du service actif sur Aural 2. Dommage, c’était un officier valeureux.

Les méfaits de l’âge, tempéra Kiros amusé, le bougre se faisait servir deux verres comme s’il attendait un invité.

Par habitude, le prince avait sondé l’esprit du commandant au sujet de sa soirée dans une taverne. Parfois, l’indiscrétion lui permettait de saisir une scène graveleuse, l’image d’une jolie fille dont il retrouvait immanquablement la trace. Cette fois, le vieux soldat s’était enivré seul à une table. La présence de Maraudeuse restait ignorée.

Vous souhaitiez m’entretenir des prochaines opérations, votre altesse ? composa le général avec déférence.

Oui. Pendant que je mènerai l’assaut sur Karal, vous aurez le pouvoir à Ashora, à vous de maintenir le calme. Je ne tolérerai aucun débordement.

Dois-je employer la force si nécessaire ?

Kiros flatta son menton imberbe, la Fédération des Étoiles surveillait les éventuelles menaces à travers de nombreuses galaxies.

Soyez mesuré dans vos réactions, général, je serai sacré roi après la victoire. Rien ne pourra se faire sans le peuple.

Bien, Votre Altesse. Et pour les étrangers ?

Surtout, n’y touchez pas, ce serait le meilleur moyen d’attirer l’attention sur notre affaire. Aural prospère grâce au commerce, nous établirons des comptoirs sur les autres planètes quand elles seront à nous.

À une douzaine d’heures terrestres de Dyonisa, le cargo en pilotage automatique se conformait au plan de vol. Une nouvelle intrusion radar, improbable, serait relayée dans les différents postes, y compris dans la salle de repos où Kalys dormait, surveillée par Héliothaïs et Sentence à son chevet. La mère de Kira, convaincue de participer à un jeu de piste, s’empressait de suivre les conseils avec le sourire. Les années de solitude dans la forêt maudite avaient eu raison de ses pouvoirs psychiques.

On n’allait pas abandonner ce nectar sur Aural, s’esclaffa Sarah d’une voix chargée des relents d’alcool, avec personne pour en profiter.

La calebasse de vin de baie ramenée à bord circulait de main en main autour de la table de la cuisine. Saramiaë but une longue gorgée sans quitter la Terrienne du regard ; la réussite de la mission détendait l’atmosphère.

Délicieusement imbuvable, conclut-elle d’un sourire provocateur, ça décoincerait une vieille pucelle.

À 30 ans depuis peu, Sarah se moquait d’une addiction à l’alcool sans conséquence sur son organisme, et se satisfaisait d’un surcroît de libidos en accord avec ses principes moraux. Aussi, quand le regard d’une Nymphe virait du gris ardoise à celui de l’acier, ses hormones s’affolaient sous la combinaison.

Carabelle attrapa la calebasse d’une main molle, curieuse de savoir laquelle des deux sauterait sur l’autre. Peu lui importait en réalité, elle comptait tirer profit de la situation. Une lampée de vin lui réchauffa le ventre ; après tout, cette mixture pouvait fort bien posséder quelques vertus aphrodisiaques.

On joue à la bouteille ? demanda-t-elle réjouie de son idée. Ça doit être pareil avec une gourde.

Maraudeuse avait enseigné aux Nymphes à se tenir assises face-à-face ou en cercle puis à faire tourner une bouteille de vin. Celle désignée par le goulot devait boire pour se donner le courage d’exécuter le gage imposé par sa voisine de droite.

La réussite aux épreuves du Grand Savoir n’occasionnait aucune réjouissance tant de nouvelles responsabilités incombaient à l’élue. Callimaque considéra l’Auralienne avec autant de considération qu’à son arrivée sur Dyonisa, même si la jeune femme pouvait prétendre désormais à jouer un rôle majeur dans le combat contre le despotisme incarné par son propre frère, de nombreuses vies en dépendaient.

Vous avez des nouvelles de la patrouille ? demanda Kira impatiente.

La formation enfin achevée, les trois semaines de séparation pesaient sur ses épaules. Elle ne connaissait rien de Maraudeuse après si peu de temps passé en sa compagnie ; pourtant, le lien était très fort. Peut-être parce que la Terrienne lui avait sauvé la vie sur Aural. Ou à cause de leur étreinte passionnée sur le vaisseau ? La jeune femme mourrait d’envie d’y croire.

Les communications avec le vaisseau sont coupées par mesure de prudence, sourit la reine loin de se laisser duper, elles seront à Opaline dans quelques heures.

D’ailleurs, tu ferais bien de prendre du repos après toutes ces épreuves, conseilla Morgania attentive aux traits tirés de l’Auralienne. Le grand conseil se réunira dès leur arrivée, nous aurons besoin de toi en forme.

La jeune femme suivit la préceptrice d’un pas lourd, consciente d’avoir vécu le jour le plus éprouvant de son existence.

La calebasse, pleine du vin d’ourtre en remplacement du vin de baie épuisé, tourna en défaveur de Saramiaë.

Embrasse-nous ensemble, gronda la voix rauque de Carabelle.

Les jeunes femmes penchées en avant, les trois bouches se trouvèrent au-dessus de la gourde. Le gage laissa la place à un désir plus profond ; elles venaient de se chauffer un long moment, le temps de faire voler les combinaisons moulantes comme une seconde peau à travers la cuisine, les pulsions étaient devenues incontrôlables.

Langues contre langues, poitrines contre poitrines, les mains aventureuses lancées à la découverte des épaules, des cuisses et des fesses, les complices s’apprivoisèrent par des attouchements désordonnés jusqu’à amener chacune au diapason des deux autres, l’osmose devait être parfaite.

Elles accentuèrent les caresses de la langue et des doigts sur les seins, sur les ventres, sur les pubis embrassés encore sagement. Les premiers râles étaient autant d’appels à la luxure, à cette appétence particulière qu’il leur fallait dompter une fois encore avant de la laisser s’exprimer.

De caresses en baisers, les jeunes femmes se retrouvèrent en triangle. Sarah posa la joue comme elle se l’était promis sur une cuisse de Carabelle obnubilée par l’intimité de Saramiaë, celle-ci se régala mentalement du fruit de la Terrienne tapi sous une flamme rouge feu. Chacune espérait l’initiative d’une autre pour se jeter dans l’étreinte.

Le temps suspendu à l’audace, Carabelle fut la première à briser la retenue malsaine, elle enfouit son visage entre les cuisses de sa congénère. Le feulement donna le départ à la course au plaisir.

La science amoureuse de Saramiaë décupla la volonté de Sarah. Rien ne lui plaisait davantage que de lécher la fente d’une femme, de caresser les parois d’une vulve avec la langue, de sentir la douce amertume de la cyprine prouver l’abandon de sa proie, de l’amener à un plaisir lent ou précipité selon les circonstances.

Les trois complices avaient joué à se chauffer trop longtemps, elles s’ingénièrent à se délivrer mutuellement de la tension accumulée. Carabelle s’aida d’un doigt impatient là où son amie l’espérait. Le vagin rempli, le bouton taquiné par une bouche audacieuse, Saramiaë enfouit sa langue au plus profond de la grotte en pétrissant les seins lourds de la Terrienne.

Celle-ci, plongée dans la moiteur de la conque, voulait amener la Nymphe à l’extase par le seul pouvoir de sa bouche. Tout juste s’autorisait-elle à taquiner du bout du nez l’il froncé de l’anus. L’une à sa merci, livrée à la concupiscence de l’autre, Sarah se laissa envahir par une émotion dédoublée.

La jouissance trop incertaine, la nature féminine restait une énigme, la jeune femme goûta un plaisir exquis. La langue affolée sur le bouton de Carabelle, elle s’enorgueillit de son orgasme sincère tandis que Saramiaë se pâmait de bonheur sous les caresses. Les trois restèrent enchevêtrées le temps de recouvrer leurs forces, puis les Nymphes mirent un point d’honneur à faire jouir Maraudeuse.

La réunion du grand conseil d’Opaline traduisait l’importance de l’instant ; l’entrée en guerre des Nymphes dépendait du rapport de la patrouille. La reine savait son armée capable de défaire celle de Kiros ; néanmoins, répandre la violence ne se décidait pas à la légère, et leur meilleure chance de rétablir l’ordre sans effusion de sang risquait fort d’être remise en question.

Soyez la bienvenue, annonça Callimaque chaleureuse.

Kalys, réjouie de se trouver en nouvelle compagnie, dansa sous les yeux de Sentence au centre de la pièce.

Le jeu de piste est terminé ? Nous avons gagné ?

Oui, lui sourit la Nymphe.

Kira approcha lentement, la désinvolture servait de barrière à une incommensurable douleur, la cause du désordre mental. Elle tendit la main vers le visage fin, détendu par les soins des patrouilleuses à bord du cargo, ces traits pourraient être les siens dans une vingtaine d’années.

Maman, bredouilla la jeune femme incapable de dire autre chose.

Vous m’avez caché que vous aviez une si délicieuse fille, glissa Kalys enchantée à Sentence, nous la prendrons dans notre équipe pour le prochain jeu.

Callimaque prit le bras de Kira.

C’est peut-être mieux ainsi, au moins elle ne souffre plus. Nous en prendrons soin dans une belle maison où l’attendent des jours paisibles, tu pourras la visiter chaque fois qu’il te plaira. Maintenant, viens, tu dois tout savoir.

Le jour levé, Sarah songeait à prendre un peu de repos, si Kira le lui permettait enfin. Les jeunes femmes, seules à la table où trônaient les reliefs du repas qui avait réuni les membres du conseil, écoutaient le temps s’égrainer en silence entre deux coupes de vin. Les carafes de blanc vides, le rouge servait à noyer la morosité. Maraudeuse ne buvait pas par plaisir, seulement pour accompagner son amie meurtrie.

Ma mère se trouve être ma tante, la malheureuse a passé des années dans une forêt soi-disant hantée, condamnée à la solitude, mon frère a emprisonné notre père et n’a pas hésité à me le laisser croire mort. À part ça, tout va bien sur Aural ! Les Nymphes vont évincer Kiros, on ceindra mon front de la couronne d’Ashor, et après ! Une reine pleine de sagesse fera régner la paix dans la galaxie ? Je n’y crois pas.

À choisir, Sarah aurait préféré sécher des larmes.

Moi non plus. Quand le patron du S. H. I. E. L. D. a voulu me recruter dans sa bande de super-héros customisés, j’ai paniqué. On me demandait à moi, une petite orpheline de Californie, de porter la défense d’une planète à bout de bras. Nick Fury en arrivait à dire que le décès de mes parents était un mal pour un bien puisque ça me permettait de protéger l’humanité. J’ai foutu le camp.

Un peu plus calme, Kira remplit les coupes d’un vin épais.

Ensuite ?

J’ai découvert d’autres planètes, dont une habitée par un peuple sage, on est dessus en ce moment. Ailleurs, c’est partout le même cirque, des salopards veulent s’arroger le pouvoir au mépris du bon sens commun. Alors, quand se présente l’occasion de botter le cul d’une de ces ordures, j’y prends un malin plaisir.

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