Santa Monica, Californie, USA, 12 mai 2014.

Il est 17 heures. Je suis dans mon bain. Leau est très chaude. Je ne pleure plus. Les yeux dans le vague, léthargique, je baisse la tête et cest la chevelure magnifique de Jenna que je vois, flottant paresseusement dans leau.

Je suis née il y a vingt ans à « El Pueblo de Nuestra Señora Reina de los Ángeles de la Porciúncula », plus connue maintenant sous le nom de Los Angeles. Jy ai grandi aussi, dans une famille aisée. Jai suivi ma scolarité à la Marymount High School, une école privée huppée tout près de lUCLA dans laquelle jai décroché brillamment mon diplôme de fin détudes. Maintenant je suis un cursus dhistoire de lart et des cultures amérindiennes à lUCLA.

Ma co-ed Jenna est aussi ma meilleure amie, mon amante et ma partenaire attitrée de beach-volley. Je lai rencontrée il y a un peu plus de six ans à la Marymount ; comme moi elle ne connaissait personne, nous navions pas quatorze ans et étions perdues sur le campus de lécole. Pour la première heure de cours, nous avons pris les deux seules places libres au fond de la salle. Nous avons chuchoté en nous regardant en coin.

Salut, je mappelle Jennifer ; ça va ?

Moi, cest Solveig. Mais par pitié, appelle-moi Sol.

Tinquiète, cest joli, Sol ; et moi, tu mappelles Jenna.

Jenna ? Jaime bien. Tu habites près dici ?

Non. Mes parents habitent Ventura.

Je connais pas ; cest au nord ?

Bingo, sur la côte, à soixante miles.

Nous avons dû cesser nos messes basses car les cours ont commencé. Mais nous avons repris à la pause, puis à la cafét ; et déjà jétais subjuguée par sa tignasse rousse indisciplinée, toute frisée, et par ses grand yeux verts qui lançaient des éclairs quand elle riait.

Mes parents habitent Long Beach, tu vois, cest moins loin que toi mais je risque pas de rentrer tous les soirs non plus.

Tu es interne alors ?

Oui, comme toi je suppose ; nous pourrions demander à être ensemble, si tu veux bien.

Ce serait génial ; je ne connais personne ici et je crois quon pourrait être amies.

La gestionnaire de linternat était une femme arrangeante ; quand elle a reçu ces deux ados courtoises et jolies comme des curs, une blonde et une rouquine, quand elle a vu leurs yeux bleus et verts suppliants, elle a souri et accepté de les placer ensemble dans une chambre double.

Mes petites, rappelez-vous que cest une fleur que je vous fais ; je comprends que vous êtes toutes deux déracinées, sans famille proche, et sûrement sans amis ici. En retour, je vous demande de bien travailler et de faire honneur à cette école.

Nos visages épanouis vinrent en écho de nos remerciements frénétiques ; elle sourit de tout son visage rond et nous chassa. Cest ainsi que naquit une amitié indéfectible et durable, une amitié renforcée par les épreuves traversées, les échecs et les victoires. La vie.

Brillantes toutes deux, nous étions aussi sérieuses et déterminées ; nous occupions toutes deux le haut du classement, dans une émulation saine et joyeuse qui nous poussait souvent à nous dépasser. Nous avions les mêmes passions : la danse et le volley-ball, la lecture et lhistoire. Et un désintérêt certain pour les garçons ; il faut dire que ceux de notre âge étaient des ados complètement immatures à lhumour graveleux et aux rires débiles. Jai été lobjet de leur drague et Jenna celui de leurs moqueries ; la rouquine filiforme au visage constellé de taches de rousseur était une cible rêvée pour tous les enfoirés de puceaux débiles que comptait lécole.

Jennifer OReilly est dorigine irlandaise ; plus celte quelle, tu meurs. Ses parents Patrick et Siobhan dirigent une affaire prospère de construction navale et son frère aîné, Sean, travaille maintenant avec eux. Ils jouent tous dun instrument de musique différent. Au moins. Piano pour maman, trompette et saxo pour papa, guitare pour Sean. Et Jenna ? Elle joue du piano comme une sur Labèque, et divinement de la guitare acoustique ou électrique, mais avec une préférence pour la steel guitar qui accompagne parfaitement le folk.

Les concerts familiaux sont toujours un grand moment, et cest pour moi un honneur dy assister ; et dy chanter, car jai hérité dune voix au timbre voilé et un peu rauque. Bien sûr, ma copine a cafté auprès de son père, et depuis, chaque fois que jaccompagne Jenna pour un week-end à Ventura, je participe activement à leur hobby. Avec le temps, jai pris de lassurance, aidée par des cours de chant à lUCLA, et jai appris à contrôler et réguler la respiration, à développer ma tessiture vocale, à placer ma voix. Pas encore de quoi remplir le Carnegie, mais

Quand nous avons intégré lUCLA, nous étions devenues de grandes et belles jeunes filles ; Jenna mesure un mètre quatre-vingts et je ne lui rends que deux ou trois centimètres. Très utile pour le volley, qui a été complété par le beach-volley à luniversité. Ce sport se joue à deux, et notre binôme soudé comme des surs siamoises joue dans une osmose parfaite, quasi surréaliste, nous permettant de triompher souvent dadversaires plus fortes techniquement.

Bien sûr nous avions emménagé ensemble, mes parents mayant offert un grand appartement à Santa Monica pour fêter mon diplôme et mes dix-sept ans. Mes parents ; cétait le début de la fin, mais je ne le savais pas encore.

Tous deux grands, blonds aux yeux bleus, Anders et Brinhild Ackeson, couple de Norvégiens immigrés au USA à vingt ans et ayant fait fortune dans le meuble contemporain en pin Douglas. Pas la renommée dIkea, mais un petit empire financier avec deux usines, une au sud de L.A. et lautre à Boston ; près de trois mille salariés, et une progression de chiffre daffaires record depuis des années. Le malheur a frappé sans prévenir, comme souvent les grands malheurs. Maman est décédée dans un accident de la route en novembre 2011 ; on pense quelle a voulu éviter un chien et sest déportée vers un camion qui déboîtait. Elle na pas souffert, cest la seule consolation donnée par le pasteur à papa.

Dès lors, ce fut la spirale ; désespéré de perdre la moitié de son cur, la moitié de son âme, papa sest mis à boire. Il y a mis tout ce qui lui restait de détermination : en un an, ses neurones étaient définitivement grillés ; il est maintenant enfermé dans un hôpital spécialisé depuis octobre 2012, dans un état proche du légume. Je vais le voir toutes les deux semaines avec Jenna. Il ne nous reconnaît pas, bien sûr ; et je repars en larmes, soutenue par mon amie.

Juste avant linternement de papa, notre avocat a été obligé de vendre la société Axonn, lautre enfant de mes parents. À tout juste dix-neuf ans je me suis retrouvée à la tête dun capital de 38 millions de dollars, plus une grande maison à Long Beach, plus un appartement à Boston. Je nétais pas à la rue, cest le moins quon puisse dire ; mais mon moral était au plus bas et je flirtais avec la dépression.

Au décès de maman, Jenna ma accordé un soutien sans faille, ne me lâchant plus dune semelle ; déjà que nous étions ensemble quasiment tout le temps, je devais presque me battre pour quelle me laisse fermer la porte des toilettes.

Jenna, je vais aux toilettes, je ne vais pas me suicider là !

Tu peux laisser la porte ouverte, je tai déjà vue nue.

Tu ne mas jamais vue faire pipi !

Ça te gêne ? Pas moi ; tu es ma sur, mon double, ma partenaire. Tu es ma famille, mon soleil.

Jenna, je ten prie, je veux juste pisser tranquillement

Tu es à moi. À moi. Je taime, Sol, mon Soleil.

Je lai regardée, stupéfaite ; nous avions souvent dit que nous nous aimions. Avant nos quatorze ans, une amitié farouche nous liait ; une amitié intense, exclusive. Là, trois ans après, Jenna osait franchir le cap de lamitié à lamour. Oh, elle me connaissait ; elle savait que je laimais, elle savait aussi que je nétais pas plus sortie avec un garçon quelle. Je me suis raclé la gorge, frottant mes cuisses lune contre lautre pour lui répondre, la voix un peu rauque.

Moi aussi je taime, idiote. Tu en douterais ? Je taime ; tu es à moi. Mais laisse-moi pisser, pitié.

Son visage sest éclairé de ce sourire lumineux qui me fait me sentir idiote et elle ma tourné le dos pour marcher en ondulant exagérément des hanches ; pieds nus, elle avait adopté la démarche dun mannequin, sur la pointe et en croisant les jambes. Elle portait un short de pyjama gris qui moulait ses jolies fesses musclées et un débardeur tout aussi près du corps. Je pouffai et faillis me faire pipi dessus. Ma rouquine préférée mattendait dans le séjour, lovée dans un coin du canapé. Elle arborait un air sérieux soudain et me jeta un regard que jeus du mal à déchiffrer. Inquiet ? Plus que ça : paniqué. Allons bon.

Hé, Jenna, ça va pas ?

Jai un peu peur ; je ne veux pas te perdre : notre amitié est tout pour moi.

Pour moi aussi.

Je naurais jamais dû te dire ça Tu as eu tellement de malheurs que je nai pas à te

Je sais : maman, et maintenant papa qui minquiète. Jai limpression quil se suicide à lalcool, et il y met tout ce quil lui reste de volonté.

Je lai vu aussi. Brin est partie depuis deux mois et je crois quil ne sen remet pas. Cest pour ça, je ne veux pas te lâcher maintenant. Ni jamais.

Tu ne me lâcheras pas, je le sais. Je suis à toi.

Les mots métaient venus naturellement : jétais à elle. Jenna la meneuse, qui mavait fait prendre une cuite une fois dans ma vie, mavait fait fumer des cigarettes et divers produits illicites juste pour me convaincre que cétait mauvais pour moi. Jenna la capitaine de léquipe de volley du lycée, Jenna la conductrice émérite de notre voiture, une Chevrolet Malibu de 2005 argent et noir. Jenna mon aînée de quatorze jours : elle est née le 15 septembre 1993 et moi le 29 septembre.

Je compris alors que jétais encore plus à elle quelle nétait à moi. Elle me protégeait depuis toujours, solide comme un roc, ancrée sur le socle de sa famille. Je suis allée magenouiller à ses pieds et ai posé la tête sur ses cuisses jointes ; elle a aussitôt commencé à caresser mes longs cheveux lisses.

Merci, Sol ; jai eu peur que tu mettes fin à notre amitié. Je naurais pas dû te dire ça, je suis trop impulsive des fois et je taime, je serais morte si tu mavais laissée seule, je ne

Jenna ne se contrôlait plus, les mots jaillissaient de sa bouche en logorrhée, dune voix blanche et monocorde ; elle avait eu peur, très peur.

STOP ! Arrête, sil te plaît. Je suis là. Tu ne crois quand même pas que tu vas te débarrasser de moi comme ça, non ?

Nous navons jamais fait lamour ensemble.

Jenna, tu devrais dire : nous navons jamais fait lamour ; point.

Oui, ça aussi. Je me suis souvent caressée en pensant à toi.

Moi aussi, mon petit incendie chéri. Moi aussi. Et alors, quest-ce que tu attends, maintenant ?

Cette nuit-là fut notre première nuit damour ; le 15 décembre 2011. Je me rappellerai cette date toute ma vie. Jenna, je lavais vue souvent nue, même avant davoir quatorze ans ; mais cela navait rien de sexuel. Je la croisais sous la douche de notre chambre à Marymount, je lui savonnais parfois le dos, lui shampouinais sa luxuriante chevelure. Plus tard nous avons échangé nos vêtements car nous sommes restées toujours très proches physiquement. Sauf la poitrine : si la mienne est bien pleine et ferme avec de petites aréoles dun rose délicat, celle de Jenna est un vrai hymne à la femme : deux globes parfaits, lourds et plantureux, à la peau diaphane parsemée de quelques taches de rousseur, et de larges aréoles carminées. Pas question que nous échangions nos soutien-gorge, bien sûr.

Malgré les craintes de ma désormais amante, notre amitié nen a été que renforcée ; notre passion dévorante a conduit notre couple à une relation fusionnelle. Pour Noël, mon père est parti à Las Vegas de manière impromptue, me laissant complètement désorientée. Tout naturellement, je suis allée à Ventura rejoindre ma copine ; ce nétait pas prévu et elle était partie la veille en bus. Jai donc fait le trajet seule avec ma vaillante Malibu ; Paddy (il naimait pas trop ce surnom mythique et moqueur à la fois) et Siobhan mattendaient sur le seuil, arborant une mine grave. Je me suis arrêtée à trois mètres deux, interloquée ; ils mont examinée sans mot dire en se tenant par la main, puis comme sur un signe invisible ont souri en même temps.

Bienvenue, Sol. Tu es chez toi ici, comme dhabitude.

Non, Pat, cest différent cette fois. Tu sais que nous tavons accueillie ici un peu comme notre fille. À partir daujourdhui, tu es notre deuxième fille.

Soudain jai aperçu Jenna derrière eux, le visage blafard et les yeux rouges ; je me suis rendu compte que Siobhan aussi avait pleuré, et mes yeux sont passés de lune à lautre.

Sol, je suis désolée, jai fait mon coming-out sans ten parler. Je Pardonne-moi.

Oh ! Oui, tu as eu raison ; je naurais pas pu cacher ça à tes parents. Jaime votre fille, Monsieur OReilly. Oui, jaime votre fille, Madame OReilly.

Tu sais, nous ne somme pas aveugles non plus ; Siob avait bien vu votre complicité, votre amitié exclusive depuis que vous vous connaissez. Même moi, avec ma vue basse, je savais quil y avait plus que de lamitié entre vous deux.

Nous te mentirions si nous te disions que nous naurions pas préféré un Viking bien baraqué ; mais notre diablesse a choisi une Walkyrie, une jeune et jolie fille que nous avons appris à connaître. Et à aimer. Ne pleure pas, Sol. Viens.

En sanglotant je me suis jetée dans leurs bras qui mont entourée de leur force, de leur chaleur. Jenna est venue se joindre à notre étreinte faite de larmes et de bonheur et nous sommes restés un long moment dans cet état de grâce où il nest nul besoin de mots, où les regards suffisent. Pour la première fois, jai dormi dans la chambre de ma compagne désormais officielle. Nous navons pas fait lamour des quatre nuits que nous avons passées à Ventura. Non que lenvie nous ait manqué, mais dun commun accord nous avions décidé de pratiquer labstinence pour quelques jours ; et de nous déchaîner dès notre retour chez nous.

En fait, être désormais compagne de leur fille na pas changé grand-chose dans mes relations avec les OReilly ; jadorais faire la cuisine et voilà des années que jaidais Siobhan, fin cordon-bleu qui ma appris énormément. Sa fille et moi étions des aides ménagères qualifiées qui ne rechignaient jamais à la tâche. Notre bonne éducation nous interdisait de rester devant la télé en la laissant uvrer au bien-être familial. Jétais chez moi dans cette famille où les coups de gueule étaient fréquents mais vite oubliés, les chamailleries incessantes, les rires fulgurants. Jai assisté à la messe de minuit entre Sean et Patrick ; je suis protestante et non pratiquante, mais jai senti alors que jétais à ma place au milieu des miens, à entonner des chants religieux que je connaissais peu ou pas.

À notre retour à Santa Monica, lambiance changea rapidement, devenant carrément torride. Jenna, magnifique dans son leggins noir sous un gros pull écru torsadé très irlandais, me lança dune voix enfiévrée :

Maintenant, tu es à moi, Sol ; je te veux toute nue devant moi, vite ; allez, dépêche ! Je veux savoir combien de fois tu peux jouir pour moi dici minuit. Il est déjà 9 heures. Trois heures donc avec mes doigts, ma langue, et le meilleur ami de lhomme ! Taa-taa ! Mon sextoy !

Elle brandit alors dun air triomphant un long tube blanc terminé par une grosse boule ; à brancher sur secteur manifestement, car un long fil électrique sortait de lautre extrémité. Nous en avions parlé en pouffant plusieurs semaines auparavant, avant même de faire lamour ensemble. Et voilà quelle lavait acheté Ainsi quun autre appareil quelle brandit alors, un petit objet bleu incurvé de taille plus réduite.

Et à minuit, je prendrai ta virginité avec mon joli petit gode. Ma chérie, prépare-toi à jouir !

Dis donc, Foxie, tu noublies pas quelque chose ?

Je ne crois pas

Et toi ? Je veux te voir jouir sous ma langue.

Pas ce soir, Sol, pas ce soir. Il ny en aura que pour toi : tu néchapperas pas à ton destin, ma belle. Et sil faut que je tattache pour te faire jouir encore et encore, je le ferai.

Jai frémi, non que la perspective dêtre attachée et à la merci de cette folle dIrlandaise me fasse peur, mais jétais nue, le ventre embrasé et poisseux, les mamelons douloureux à force dêtre gonflés. Jai frémi en imaginant tout ce qui mattendait là, tout de suite.

En vérité, jai cru mourir. Allongée sur le lit les cuisses ouvertes, je nai mis quune quinzaine de secondes pour atteindre le premier orgasme sous les vibrations démentes du vibrateur blanc. Appliqué sur ma vulve lubrifiée et soigneusement épilée, il a titillé mon clitoris en marrachant des gémissements et même des cris rauques. Quand je suis retombée sur Terre en respirant trop fort, Jenna affichait une mine interrogative.

Waouh ! Si tu décolles aussi vite, tu vas te retrouver en orbite avant minuit ! Ça va ?

Oui, mais cest une tuerie, ce truc. Putain, jai joui en dix secondes !

Je ne puis me souvenir du nombre dorgasmes ressentis cette nuit-là, mais jaurais pu être sur le Guinness Book. De fait, comme jétais épuisée de jouissance, la diablesse à qui javais donné mon cur ma attachée bras et jambes écartelés aux pieds du lit avec un gros rouleau de corde en coton blanc. Et là, elle a tété mon clitoris qui dardait hors de son capuchon, rouge vif dexcitation, buvant ma liqueur intime qui ruisselait de mon vagin. Ses doigts fins avaient empoigné mes tétons pointés et les ont tordus et caressés et fait rouler, me faisant hurler sous la fulgurance de lextase.

Ma virginité, je la lui ai offerte ; elle la prise à une heure du matin, après une bonne douche prise ensemble. Cest seulement à ce moment-là quelle sest déshabillée ; cest peu dire que sa petite culotte était trempée Nous nous sommes savonnées et caressées lentement, les yeux remplis damour. Puis, tendrement, précautionneusement, elle a enfoncé le petit gode dans mon vagin après sêtre assurée que jétais prête. Une douleur fugace et le cylindre bleu était en moi. Un peu de sang le décorait quand elle la retiré : javais offert ce que javais de plus précieux à mon amante.

Le bonheur. Le bonheur partagé, entre nos études, les tournois de beach-volley avec nos petits maillots deux pièces sexy, les concerts familiaux à Ventura. Les malheurs partagés, linternement de papa, le cancer du sein de Siobhan.

Trois années de vie, de joies et de peines partagées ; de bonheur.

Hier, la police a retrouvé la Malibu abandonnée sur une aire déserte de la route 101, dans le Newbury Park. Elle revenait dune visite express chez ses parents, et je navais pu laccompagner à cause dun rendez-vous chez le dentiste. Le corps de Jennifer OReilly vient dêtre retrouvé par une patrouille de la Police des Routes sur le bas-côté, non loin de là. Battue et violée, puis tuée à coups de couteau. Siobhan ma appelée il y a une heure. Je navais pas dormi de la nuit et jétais dans un état proche de lhébétude ; je nai pas réagi, jai raccroché sans dire un mot.

Il est 17 heures. Je suis dans mon bain. Leau est très chaude. Je ne pleure plus. Les yeux dans le vague, léthargique, je baisse la tête et cest la chevelure magnifique de Jenna que je vois, flottant paresseusement dans leau. Rouge sang. Attends-moi, jarrive.

Jentends des cris, des coups de poings sur la porte dentrée, la sonnette qui saffole. Je menfonce dans leau lentement ; je glisse : la bouche, le nez, les yeux. Je te vois, toute pâle mais paisible ; tu me souris et tu me tends la main.

Jarrive.

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