Un vendredi soir comme un autre. Je suis chez Aline et Fred. Ça fait maintenant trois semaines que on fait comme si rien ne s’était passé, comme si tout était comme avant, mais plus rien n’est pareil.
– Bon alors, raconte-nous ta conquête de la semaine.
– Holà, accrochez-vous bien, je suis tombé sur une sacrée chaudasse cette fois.
Ce n’est pas ma conquête de la semaine, mais une fille sur qui j’étais tombé il y a environ deux ans. Ce n’est pas grave, je n’avais jamais eu l’occasion de leur raconter. La vérité est que la dernière fille à s’être allongée sur mon lit est Aline. Je n’ai plus l’envie d’aller à la pêche, je n’ai plus envie d’une fille d’un soir avec qui on se promet de ne plus jamais se revoir.
Il m’arrive maintenant de rêver d’être en couple. Il m’arrive d’imaginer et espérer vivre avec quelqu’un dont je serais amoureux. Mais, il est surtout trop tôt pour que je leur fasse part de ces confidences. Alors, je continue à raconter cette histoire de mon plan cul. Aline me coupe la parole :
– Je suis enceinte.
Fred me regarde avec un grand sourir aux lèvres. J’en ai les larmes aux yeux, je souris à mon tour, et les prends dans mes bras. Mais une boule s’est formée dans ma gorge et elle m’étouffe. J’ai besoin de prendre l’air, je veux fuir cet endroit.
– Oh putain, j’avais complètement oublié. Vous savez que c’est l’anniversaire de mon père la semaine prochaine et ma mère voulait que je passe la voir pour l’organiser. Elle va me tuer.
– C’est bon, vas-y, il n’est pas trop tard.
– Vraiment ? Ça ne vous dérange pas ? Merci, vous me retirez une sacrée épine du pied là. Je me ferai pardonner, promis.
Je fuis, je rentre chez moi, je m’installe sur le canapé. Une amie m’accompagne, une amie que je vide petit à petit durant toute la nuit sans pour autant m’aider à trouver le sommeil.
Le vendredi suivant, je trouve une excuse pour ne pas aller chez Aline et Fred : un dossier au boulot que je dois absolument clôturer. Celui d’après, une invitation ailleurs, avec les big boss qui seront présents. Et ainsi de suite pendant un mois et demi.
Et encore un vendredi soir en compagnie de la télé et d’une bouteille fraîchement ouverte. La pillule ne passe toujours pas. Mes amis me manquent mais c’est encore plus dur de les voir. Je rêve d’Aline toutes les nuits, ça en devient obsessionnel.
On frappe à la porte, je ne bouge pas. On frappe à nouveau, je me décide à ouvrir :
– Aline ? Qu’est-ce que tu fais là ?
– Tu n’avais pas un truc de prévu, toi ?
– Ah oui, ça a été annulé à la dernière seconde. Je ne vous ai rien dit car je ne voulais pas que vous cassiez tous vos plans à cause de moi, si
– Tu mens très mal, et ce n’est pas la première fois que je te le dis.
– Fred n’est pas avec toi ?
– Je lui ai dit que je sortais avec mes anciennes copines de lycée ce soir.
– Tu n’as pas peur qu’il en appelle une pour vérifier que c’est vrai ?
– Tu sais quoi ? J’aimerais vraiment qu’il le fasse. Mais, ça n’arrivera pas. Tu me manques.
Je n’ai pas eu le temps d’ouvrir la bouteille, en boire une seule gorgée, et pourtant, j’ai l’esprit embrumé. Je ne me contrôle pas : je l’attire contre moi et l’embrasse. Nous nous précipitons à l’intérieur de l’appartement, elle se débarrasse précipitamment de son manteau qu’elle jette à l’autre bout de la pièce. Je vois à peine cette jolie robe noire que je lui retire d’un coup tout en la touchant de partout. Elle sent bon, je sais qu’elle ne met jamais de parfum, mais son odeur m’enivre.
Tout le reste n’est que l’expression de pulsions animales. Il n’y a aucune cohérence dans nos ébats, juste de l’envie et un plaisir intense. Nous baisons dans chaque recoin de l’appartement, sans se soucier de quoi que ce soit, comme si nous étions seuls au monde. Et nous ne voyons même pas le temps passer.
– Aline, arrête de lécher ma bite. Je n’arriverai pas à la relever. Je ne suis pas un surhomme.
– Dommage. J’ai encore envie de la sentir dans mon petit trou.
– Dis donc, tu commences à apprécier la sodomie toi.
– Oui, je trouve ça meilleur à chaque fois
–
–
– C’est pas bien ce qu’on fait.
– Je sais.
– Il ne mérite pas ça.
– Il ne m’a pas touchée depuis j’ai eu peur en arrivant que tu sois déjà occupé avec une autre.
– Pour être franc, il n’y a eu personne depuis toi.
– Je m’en doutais.
Elle vient s’allonger contre moi, compressant un sein contre mon épaule et caressant mon torse. J’ose lui demander
– Il se passe quoi avec Fred ?
– Je ne sais pas. Il est comme d’habitude, mais je le sens distant en même temps. D’un point de vu sexe, ça n’a jamais été ça, mais ça empire de plus en plus et ce n’est pas pour me déranger. Je n’ai plus envie qu’il me touche. Je l’aime pourtant toujours autant.
– Ce n’est qu’une phase. Il y a eu tous ces évènements pour enfin réussir à avoir un bébé. Et puis l’arrivée même du bébé fait que
– Tu crois que lorsqu’il sera là, tout ira mieux entre Fred et moi ?
J’aimerais lui dire oui. Mais je ne veux pas lui mentir, ni lui dire ce que j’en pense. Je garde le silence. Je ne connais aucun couple autour de moi pour qui l’arrivée d’un bébé a permis de résoudre leurs problèmes. Bien au contraire même.
– Il faudrait que vous parliez tous les deux.
– Tu sais que ce n’est pas mon fort. D’habitude, c’est Fred qui soulève les sujets délicats en premier. Et on parlerait de quoi ?
– Je ne sais pas. J’ai pas envie que vous vous sépariez. Vous êtes le couple le plus stable que je connais.
– Plus maintenant.
– Vous êtes mes meilleurs amis, et je n’ai pas envie de vous voir vous déchirer. En plus, je te rappelle que tu es enceinte, ce que vous vouliez depuis des années. Promets-moi d’essayer d’arranger les choses.
– Je peux essayer, je ne peux pas te promettre d’y arriver. C’était la dernière fois entre nous deux, c’est ça ?
– Oui. Il le faut.
C’est la toute dernière cigarette avant la suivante… C’était notre dernière baise jusqu’à ce qu’elle me propose de déjeuner ensemble alors qu’elle était justement pas loin de mon boulot. Nous sommes au milieu du repas, nous sommes dans les toilettes comme des étudiants bourrés d’hormones qui n’arrivent pas à se retenir. Nous venons de finir notre affaire
– Attends, tu as décalé les boutons de ton chemisier. Laisse moi faire.
– Profiteur, tout ça pour me toucher les seins.
– Je croyais que tu n’aimais pas avaler.
– Comme si c’était la première fois que je te le faisais. Et ce n’est pas que j’en ai envie, mais je ne voulais pas que tu me foutes du sperme partout. En plus, il parait que c’est un bon antidépresseur.
– C’était la dernière fois entre nous, ok ?
– Evidemment.
La dernière fois ? Pas vraiment en fait. Et il y eu la fois suivante, et encore celle d’après, et encore Nous nous voyons quasiment tous les deux jours pour un petit coup rapide parce qu’on n’a pas forcément beaucoup de temps devant nous, et que nous ne voulons pas que Fred se doute de quelque chose.